S’il détestait qu’on le compare à Docteur House, Josh n’en avait pas pour autant arrêté de lui prendre quelques-unes de ses idées de relaxation. Il avait toujours dans son cabinet une petite balle qui lui servait lorsque les patients ne se bousculaient pas au portillon. Ce qui était de plus en plus récurrent, et ce qui inquiétait d’ailleurs le médecin. Il n’allait pas continuer à gagner correctement sa vie si tous les habitants de Shady Cove refusaient de se faire soigner par lui. Bon, il y avait toujours les personnes plus âgées qui ne connaissaient pas sa réputation et qui n’hésitait jamais à venir le consulter, mais la tranche d’âge moyenne désertait son cabinet et ne faisait plus appel à ses services.

Ce n’était pas tant pour ses qualités de docteur que pour ses autres talents. Josh était un bon médecin. Il était sorti premier de sa promotion. Il connaissait son métier. Il n’était pas seulement généraliste, il avait fait une spécialisation en chirurgie. Mais lorsqu’il avait accepté l’offre de ses parents, et pris le cabinet qu’ils lui offraient, il s’était, sans s’en rendre compte, réduit à la simple occupation de médecin généraliste. Elle était bien loin l’époque où il était tellement doué qu’on lui demandait d’instruire les plus jeunes. Être médecin à son propre compte, c’était lucratif, mais peu divertissant.

C’était la raison pour laquelle il s’amusait à faire rebondir une balle sur un mur tout en songeant à ce que sa vie aurait pu être s’il s’était laissé aller jusqu’à devenir chirurgien… quelle spécialisation aurait-il choisie ? Cela aurait été bien plus trépidant que de prescrire de l’imodium à toute personne souffrant de problème de transit. Malgré tout, sa situation ne lui déplaisait pas tant que ça. Il avait pas mal de temps pour lui. Mais sa vie manquait sérieusement de piquant.

Alors que sa balle rebondissait une nouvelle fois sur le mur, il songea… et s’il se lançait de manière plus approfondie dans la chirurgie. S’il ouvrait une clinique chirurgicale juste à côté de son cabinet ? Il rit un instant, mais cette idée lui trottait dans la tête depuis un moment déjà. Il pourrait engager des gens, et diriger plus que son simple petit bureau. Ça c’était du projet.

Impossible de dormir plus longtemps. Depuis plus d’une heure, Alyssa somnole plus ou moins, dérangée par une douleur. Elle gigote, se tourne, se retourne. Elle n’arrive pas à retrouver le sommeil et cette douleur l’inquiète, la dérange. Présente au milieu de son dos, elle n’arrive à la toucher. Ca la démange, la brûle. Elle se dit d’abord qu’il s’agit d’une piqûre d’insecte ou de quelque chose dans ce style. Elle continue de lutter pour essayer de se rendormir mais se lève, frustrée, direction la salle de bain pour prendre sa douche.

Et une douche bien chaude plus tard, la jeune femme enroule une serviette autour de sa silhouette encore ruisselante et se regarde dans le miroir. Effaçant la buée d’un revers de la main, elle se tourne finalement pour tenter d’observer son dos, intriguée par cette démangeaison. Surprise, elle reste bouche bée devant la tâche rouge. Elle fronce les sourcils, curieuse de savoir d’où ça vient, ce qui a bien pu lui faire ça. C’est arrivé d’un coup, elle espère que ça partira de la même manière.

Maintenant qu’elle a vu l’ampleur des dégâts, elle ne cesse de se gratter – enfin, elle essaye ! – dans l’espoir de stopper la démangeaison. Elle grimace, elle peste. Elle ne peut pas rester plus longtemps comme ça. Elle n’est pas spécialement fan des médecins, un paradoxe pour elle qui voulait faire médecine ! Elle est plutôt du genre à fonctionner à l’automédication plutôt que d’aller consulter, mais là, elle n’en peut plus. Et c’est ce qui la mène au cabinet du docteur Young. Heureusement pour elle, ce médecin n’a pas une excellente réputation, du coup, elle est pratiquement sûre qu’elle n’aura pas à attendre trop longtemps. Et en effet, quand elle arrive au cabinet elle constate que la salle d’attente est vide. Une chance pour elle ! Enfin…chance…en espérant que le médecin soit tout de même assez compétent pour lui venir en aide !

« Y'a quelqu'un ? »

Vu l’heure qu’il était, et bien qu’il soit dans son cabinet, Josh n’attendait pas tellement de visite. D’autant que les affaires se faisaient maigres ces derniers temps. C’était un excellent médecin, mais les patients le fuyaient comme la peste. Il avait pourtant toujours cru que la réputation d’un docteur se basait sur ses capacités et non sur sa vie privée. Il s’avérait qu’il avait tort. C’était sans doute parce qu’il donnait aisément des congés, se lâchait fort sur les prescriptions. Il n’était pas contre un petit coup de main filé au détour d’une consultation. Mais lorsque le problème était sérieux, il prenait toujours son job à cœur, et le faisait convenablement.

Mais son cabinet restait somme toute assez vide. Aussi lorsqu’il entendit une voix demander s’il y avait quelqu’un, il crut un instant que la radio s’était mise en route, qu’il devenait fou, qu’il entendait des voix, ou pire qu’il était mort cette nuit et qu’il arrivait à présent au paradis… mais cette dernière option ne lui plaisait. Si l’enfer –car il irait en enfer, c’était certain- ressemblait à sa ville actuelle… il comptait bien vivre encore longtemps.

« Yep, par ici ! »

Lança-t-il de sa voix puissante avant de se lever de son siège et de poser la balle qu’il venait de rattraper au vol sur son bureau. Il se dirigea vers la source sonore. C’était une voix féminine, et à vrai dire cela le surprenait. Les filles venaient le trouver chez lui, pas à son cabinet. Et s’il s’agissait d’une patiente… well, too bad. C’était ça aussi les inconvénients du métier, il fallait soigner avant tout. En même temps, il ne l’avait toujours pas vue. Elle était peut-être repoussante.

Il passa le seuil de son cabinet, et aperçut la jeune fille. Non, non en fait, elle n’était pas du tout repoussante. Que du contraire. Josh s’avança vers elle, un fin sourire aux lèvres.

« Que puis-je pour vous ? »

Demanda-t-il poliment, tout en s’imaginant tout de même à quoi ressemblerait la jeune fille sans ses vêtements.

Pas très fan des médecins en général, Aly a tendance à laisser certaines choses traîner, quitte à laisser les choses s'empirer avant d'intervenir. La plupart du temps, elle identifie rapidement le soucis et se soigne seule en passant à la pharmacie. Mais de temps en temps, elle doit bien avouer que ses deux années de médecine ne lui suffisent pas pour les cas un peu plus compliqués qu'un petit rhume. Comme aujourd'hui, elle se sent impuissante. Des plaques rouges sont nées au milieu de son dos, et ça l'inquiète autant que ça la dérange. C'est désagréable et elle ne sait absolument pas ce qui a pu provoqué ça. Ne pouvant plus passer sans minutes sans avoir envie d'attraper le premier objet un peu long lui permettant de se gratter là où ses bras ne lui permettent pas d'aller, elle décide de se rendre au cabinet du docteur Young. Elle n'a pas entendu dire que du bien de lui, mais rien qui ne disait qu'il était mauvais médecin. Sa vie privée elle s'en fiche bien, tant qu'il peut régler son problème. C'est tout ce qui l'intéresse pour l'instant.

Débarquant à l'improviste, elle se retrouve dans une salle d'attente vide et silencieuse comme la mort. Elle se demande pendant un instant si le cabinet n'est pas fermé, mais s'il l'avait été, la porte ne serait pas ouverte, logique. Tant mieux pour elle, elle n'aura pas à attendre d'insupportables minutes, s'aidant du dossier de la chaise pour se gratter le dos à la manière de Baloo dans le livre de la jungle, contre un arbre. Alors qu'elle appelle pour s'assurer qu'il y a bien quelqu'un, une réponse se fait entendre dans le cabinet du médecin avant que celui-ci n'apparaisse.

« Oh, bonjour ! Je...j'ai besoin de vous pour un petit problème...»

Commence-t-elle avant d'entrer dans le cabinet, quoi qu'un peu hésitante. Elle trouve ça tellement bizarre de voir un cabinet médical désert. Elle en vient presque à se demander si elle n'est pas juste barge de venir consulter ici. Un cabinet vide, ça en dit long sur un médecin en général. Mais peu importe, maintenant qu'elle est là, elle va pouvoir se faire sa propre idée. Elle ne se voyait pas aller jusqu'à la ville la plus proche et attendre des heures qu'un médecin accepte de la voir, de toute manière.

« J'ai comme une grosse plaque rouge dans le dos, je sais pas d'où ça vient, mais ça gratte affreusement, j'sais pas trop c'que ça peut être...»

C'est justement pour ça qu'elle vient voir Josh, aujourd'hui, parce qu'elle ne sait pas - et qu'il est difficile pour quelqu'un qui n'est pas médecin de deviner - ce qui lui arrive. Attendant qu'il prenne la parole pour lui poser des questions ou pour l'examiner - qu'il fasse son boulot, donc - elle l'observe. C'est drôle, son visage lui est familier...

C’était une très mauvaise période pour les affaires en ce qui concernait Josh Young, médecin de Shady Cove. Les patients avaient tendance à la juger sur ce qu’ils entendaient à l’extérieur concernant sa vie privée. Et pourtant, il n’était pas mauvais médecin le petit. Au contraire, il était même plutôt bon. Un peu rapide certes. Mais c’était son efficacité qui le rendait véloce.

Malgré tout, il fut surpris d’entendre quelqu’un pénétrer dans son cabinet. Bien qu’heureux, il se demanda tout de même qu’elle était cette personne qui osait s’aventurer chez le méchant docteur que tout le monde fuyait comme la peste. C’était une jeune fille plutôt agréable à regarder qui lui souffla qu’elle avait besoin de lui pour un petit problème…

Ne s’autorisant pas à laisser son esprit dévier sur un mauvais p*rno dont cette phrase aurait pu être la première réplique, il invita sa patiente à rentrer dans son cabinet. Il la laisser le précéder et lui proposa de s’asseoir face à lui pour commencer.

« Je vous écoute. »

Dit-il très professionnellement. La jeune femme lui expliqua qu’il s’agissait d’une plaque rouge qui s’était étalée le long de son dos. Josh fronça les sourcils avant de déclarer :

« On va voir ça mademoiselle... »

Il attendit qu’elle lui donne son nom de famille, qu’il puisse ainsi remplir ses dossiers. Il n’était pas mauvais médecin… il complétait bien ses dossiers. Et si sa patiente était contente de lui, peut-être qu’elle pourrait faire cesser ces commérages sur les pratiques douteuses de son cabinet. Enfin… c’était beaucoup espérer. Il n’avait jamais vu la jeune fille et si elle s’était aventurée dans son cabinet, c’était peut-être qu’elle était nouvelle en ville.

« Venez vous asseoir ici, je vais doucement soulever votre pull, et regarder ça. »

Il lui expliqua ce qu’il allait faire pour qu’elle ne fut pas surprise. Il la fit donc asseoir sur cette espèce de lit surélevé que possédaient tous les médecins, puis observa la tâche rouge sur son dos.

« Vous êtes sujette au stress ces derniers temps ? »

Alyssa est assez inquiète depuis la découverte de cette tâche rouge qui la démange affreusement. Elle ne sait pas d'où ça vient et ne voit vraiment pas ce que ça peut être. Si sa mère était là, elle lui glisserait subtilement à l'oreille que si elle n'avait pas arrêté ses études pour se consacrer à sa passion, elle serait capable de se soigner elle-même pour d'autres raisons qu'un rhume. Et encore, Alyssa se demande si un médecin peut être malade. A force d'être confronté à des microbes, il doit être pas mal immunisé. Enfin, la n'est pas la question.

Elle s'aventure donc dans le cabinet du docteur Young, sans même penser aux choses qu'elle a pu entendre à son sujet. Enfin, si, un peu, au moment où elle le voit. C'est un bel homme, il doit beaucoup plaire aux femmes et inversement. La conscience d'Aly hausse les épaules. Les femmes qui ont lancé les rumeurs à son sujet - car elle imagine mal un homme lancer une rumeur, en fait - sont probablement des femmes jalouses ou frustrées (a). Aly ne craint pas vraiment le médecin, puisqu'elle n'a jamais rien entendu de mal concernant son travail, mais surtout parce qu'il a un physique qui aide particulièrement à se détendre.

« Stewart. »

Termine-t-elle dans un sourire voyant le médecin poser son stylo sur le dossier, attendant gentiment qu'elle lui donne un nom pour l'y inscrire. Alyssa est persuadée de n’avoir jamais croisé cet homme en ville, et pourtant, elle a déjà entendu parler de lui. Elle l’imaginait plus vieux, avec quelques cheveux blancs, mais il est bien loin de tout ça. Pourtant, même si elle est sûre de ne l’avoir jamais vu à Shady Cove, il ne lui semble pas si inconnu. Il dégage quelque chose qu’elle a déjà vu auparavant, mais elle n’arrive pas très bien à se souvenir d’où…Elle n’a pas une très bonne mémoire et n’est absolument pas physionomiste, même si de temps en temps, certains détails peuvent la marquer particulièrement, comme ses jolis yeux bleus, par exemple.

Ecoutant sagement le médecin, elle s’assoit et le laisse soulever son pull, se penchant même pour l’aider à mieux voir la plaque rouge. Passant une main dans sa nuque pour récupérer ses longs cheveux, elle les rassemble tous du même côté, pour ne pas le déranger. Elle se redresse légèrement, dans un petit sursaut, sentant un contact froid contre sa peau – la main du médecin. Levant doucement les yeux pour réfléchir à la question, elle cherche les sources de stress qui peuvent peser sur elle en ce moment et en trouve deux ou trois. Mais de là à dire que c’est du gros stress capable de faire réagir son corps inutilement, peut-être pas. Il faut dire qu’elle a un peu de mal à se concentrer puisque sa réflexion n’est pas complètement axée sur les causes de son possible stress. Elle cherche pourquoi le docteur Young lui donne une impression de déjà-vu.

«Hm. Je ne crois pas. Enfin, pas de gros stress, non…»

Lorsqu’il s’agissait de son boulot, Josh était consciencieux, même si la jeune fille était particulièrement belle. Comment se faisait-il qu’il ne l’ait pas repéré plus tôt. Nouvelle en ville ? Pourtant, elle lui semble familière…

Ce n’était pas la question. Josh avait rencontré (et couché avec) tellement de femme qu’aucune en particulier n’allait sortir du lot. Il n’y avait qu’Eliza dont il se souvenait encore le nom après l’avoir mise dans son lit. Là non plus n’était pas la question.

Josh nota le nom de famille de la jeune fille dans son dossier sans y prêter plus d’attention. Il se leva ensuite, et fit asseoir la jeune fille afin de mieux observer les rougeurs qui avaient pris possession de son dos. Il lui demanda presque naturellement si elle était sujette au stress. Le stress causait souvent des réactions cutanées. Des plaques rouges surgissaient de partout et démangeaient plus que raison. Et le seul remède était le repos et quelques crèmes apaisante.

« Vous avez fait de l’eczéma étant plus jeune ? »

S’enquit-il naturellement. Il voulait être certain de bien couvrir toutes les possibilités. Les rougeurs cutanées étaient les plus mystérieuses. Il y avait toutes sortes de facteurs qui pouvaient engendrer de tel symptômes. Il fallait cependant qu’il arrive à mieux cibler sa patiente.

« Rien d’autre de particulier ? Pas de fièvre, toux, nausée ? »

Lui demanda-t-il alors qu’il remettait son pull en place. Il se mit ensuite à ses côtés et lui indiqua qu’il allait à présent soulever l’avant de son pull afin d’observer l’étendue de cette rougeur. Il esquissa un fin sourire comme pour s’excuser. C’était son métier, certes, mais les femmes doutaient toujours de lui lorsqu’elles connaissaient sa réputation. Et pourtant, il ne débordait jamais dans son boulot. Il ne plaisantait pas avec la maladie (il était d’ailleurs un fervent activiste du mouvement « safe sex ») Il y avait trop de cochonneries qui trainaient partout que pour prendre des risques.

« Vous avez mangé un aliment inhabituel ? »

C'est assez perturbant pour Alyssa qui n'est pas du tout physionomiste de se dire que cet homme lui dit quelque chose sans réussir à savoir qui, comment, pourquoi. Elle se tortille les méninges tout en essayant de trouver les réponses aux questions du médecin. Bien sûr, elle a très envie de savoir d'où vient cette plaque rouge et douloureuse qui se trouve dans son dos, mais elle a aussi très envie de savoir pourquoi cet homme lui semble si familier. Si elle l'avait rencontré ou croisé à Shady Cove, elle s'en souviendrait forcément.

A la question concernant l'eczéma, elle secoue la tête à la négative. Elle n'a jamais eut de problèmes de peau ou de santé dont elle se souvienne. Elle a toujours été en bonne santé. Du coup, elle ne peut même pas l'aider dans son diagnostique.

« Non, jamais. »

Répond-t-elle en pinçant les lèvres. Elle lève un instant les yeux au ciel pour repasser les derniers jours dans sa tête. A-t-elle eut des soucis particuliers ? C'est bien possible. La veille au soir, elle n'était pas dans son assiette. Fiévreuse, elle a passé la soirée dans son lit à grelotter dans son demi-sommeil. Elle n'a même rien mangé. Ce matin, ça allait beaucoup mieux, alors elle ne s'est pas inquiétée, elle pensait à un coup de fatigue. Elle n'a fait aucun rapprochement avec cette plaque. Y'en aurait-il un ?

« Hm. Si, hier soir, j'étais fiévreuse, mais ça allait beaucoup mieux ce matin, à part les démangeaisons...! »

Avoue-t-elle en cherchant encore le rapport. Tout ça l'inquiète de plus en plus, elle pensait d'abord à une piqûre de moustique, ou à quelque chose de ce style, mais ça semble être plus important que ça. Elle n'a pas changé ses habitudes alimentaires et n'a rien ingéré d'inhabituel. Elle ne se connait aucune allergie. Haussant les épaules, elle secoue une nouvelle fois la tête. Se redressant tout à coup, un éclair de génie la prend. Rien à voir avec sa plaque dorsale, non. Elle croit bien savoir d'où lui vient cette idée de déjà-vu ?

« Dites-moi, on ne se serait pas déjà croisés y'a un moment ? Votre visage m'est familier... »

Demande-t-elle sérieusement.

Josh était à mille lieues d’imaginer qu’il avait déjà croisé la jeune fille. Il se concentrait plus sur ces plaques rouges qui avaient pris possession de son dos. Et s’il avait dû se faire une réflexion concernant un éventuel passé commun, il se serait arrêté à : « une fille aussi jolie, je me la serais tapée et je m’en souviendrais… »

C’est pourquoi il avait repris la visite sans aller plus loin dans ses pensées. Il essayait de trouver l’origine du rash. Mais si elle n’était pas stressée, il fallait qu’il trouve un autre diagnostic que celui qui lui avait immédiatement sauté aux yeux. Ce n’était pas une réaction allergique au test. Il allait peut-être même falloir lui faire une prise de sang pour être sûr. Mais il continua néanmoins de l’interroger.

Elle n’avait jamais fait d’eczéma. Mais cependant elle avait été fiévreuse la veille au soir. Josh fronça les sourcils et demanda :

« Des antécédents familiaux de plaques de ce genre ? »

Il voulait exclure la possibilité d’un Psoriasis. Et la jeune fille était bien trop jeune pour que cela soit l’érysipèle. Cependant, les plaques venaient bien de quelque part. Il n’arrivait pas à déterminer la source de l’infection.

« Vous avez pris quelque chose pour la fièvre ? »

S’enquit-il sachant très bien que des patients pouvaient faire des réactions allergiques fortes à un médicament comme l’aspirine ou quelque chose de la sorte. Surtout si elle était allergique à la pénicilline, ce qui fut d’ailleurs sa question suivante. Mais la jeune fille l’interrompit en lui demandant s’ils ne s’étaient pas croisés quelque part. Josh fut pris au dépourvu. Alors il n’était pas le seul à avoir eu cette sensation ? Mais d’où connaissait-il une aussi jolie jeune fille qui n’ait pas terminé dans son lit.

« Et bien… hum. Je me posais la même question. Mais j’avoue ne pas me souvenir d’où on pourrait se connaitre. »

Depuis qu'elle a croisé le regard du médecin, elle est plus préoccupée par cette impression de déjà-vu que par les plaques rouges qui la démangent. Le médecin lui pose des questions à ce sujet. Questions auxquelles elle répond, espérant faire avance le schmilblick mais ses réponses n'ont, pour le moment, pas l'air de correspondre avec ses premiers diagnostiques. Elle n'a jamais eut ce genre de soucis par le passé et n'a jamais été sujette à des problèmes de peau. Niveau santé, elle n'a jamais eut à se plaindre. Elle ne se souvient pas avoir déjà entendu parler d'antécédent particuliers dans la famille. Ça ne veut bien sûr pas dire qu'il n'y en a jamais eut, elle ignore malheureusement la réponse.

« Je crois pas. Mais j'pense que j'en aurai entendu parlé si ça avait été le cas...»

La deuxième partie de sa phrase est surtout une pensée à voix haute. Il est bien possible qu'elle ait juste raté l'information. Elle essaye brièvement de voir, par le passé, si ses soeurs ont déjà rencontré quelque chose de ce style mais ça ne lui dit vraiment rien. Elle hausse les épaules. La nouvelle question du médecin est à propos des éventuels symptômes dont elle a pu être victime, en dehors des plaques. Il y a bien eut un peu de fièvre, la veille au soir.

« Oui, de l'aspirine. Mais ça n'a pas fait retomber la fièvre. Ce matin, ça allait mieux. »

Alyssa n'aime pas trop l'aspirine. Elle part du principe que ça ne sert à rien. A chaque fois qu'elle a mal à la tête et qu'elle en consomme, ça ne change absolument rien, elle doit prendre son mal en patience et attendre que ça passe tout seul. Pour sa fièvre, elle était sceptique mais elle en a pris quand même, au cas ou. C'est finalement le sommeil qui a fait passer la fièvre. Coupant la parole du médecin, elle s'en excuse dans une grimace sans pour autant terminer sa question. Elle est vraiment persuadée de l'avoir déjà vu quelque part sans se souvenir d'où. Elle est contente de voir que le sentiment est partagé, même si ça ne l'aide pas. En effet, même lui n'a aucune idée d'où ils pourraient se connaître.

« C'est agaçant cette impression...Et puis, je sais que tant que j'aurai pas éludé la question je vais penser qu'à ça ! »

Confie-t-elle dans un rire. Parfois, quand elle cherche un truc, ça tourne à l'obsession. Elle a toujours été un peu excessive, c'est dans sa nature.

Plus il interrogeait la jeune fille, plus Josh pensait avoir découvert les raisons des plaques sur la peau de la jeune fille. Elle avait pris une aspirine qui n’avait pas fait retomber sa fièvre, celle-ci s’était améliorée le lendemain matin. Josh hocha la tête. Il avait déjà pu exclure les possibilités les plus alarmantes. Elle n’avait pas d’antécédents familiaux, ce qui évitait au médecin d’avoir à chercher une pathologie génétique, qui était la plupart du temps les plus graves. Il était d’ores et déjà rassuré. Le docteur Young n’avait pas eu beaucoup de patient ces derniers temps, il n’aurait plus manqué que sa première patiente soit venue le consulter pour une maladie cutanée qui aurait demandé des soins intensifs.

« En général, l’aspirine ne fonctionne pas sur vous, n’est-ce pas ? »

Demanda-t-il de plus en plus certain de lui. Mais il fallait tout de même qu’il s’assure qu’il n’avait pas omis de détail. Il songeait à une réaction allergique à l’aspirine. Une réaction particulière, certes. La plupart des gens ignoraient pendant de longues années être allergique à quoique ce soit, en particulier pas à l’aspirine. Puis cela dépendait aussi de sa composition.

Il s’écarta de sa patiente pour sortir une crème d’un de ses tiroirs. Il en versa un peu sur sa main, tout en écoutant la jeune fille rire sur la possibilité qu’ils se connaissent de quelque part, elle semblait en faire une fixation.

« Et bien, on va trouver ça, pour nous éviter à tout deux des obsessions. »

Il appliqua légèrement la crème sur les plaques de la jeune fille tout en lui mentionnant que d’ici quelques minutes, elle devrait déjà sentir une amélioration. La démangeaison devrait s’amoindrir et cette sensation de chaleur disparaitre.

« Vous êtes d’ici ? De Shady Cove ? »

Lui demanda-t-il afin d’essayer de percer le mystère de leur rencontre. Il savait que cela limiterait le choix si ce n’était pas le cas, puisqu’il avait passé toute sa vie dans cette petite bourgade hormis les quelques années qu’il avait passées à l’université et en internat de médecine.

D'être dans le cabinet du docteur Young rend son inquiétude un peu moins pesante. Elle est toujours inquiète, bien sûr, et c'est normal vu qu'elle a une plaque rouge dans le dos et qu'elle n'a aucune idée de pourquoi ni comment elle est arrivée ici. Mais au moins, le médecin n'a pas l'air alarmé, alors ça ne doit pas être un truc grave. Pendant un moment, elle a franchement flippé en se disant qu'elle avait chopé la gale ou peut-être même un herpès dorsal, allez savoir. Tout de suite, elle fait la liste dans sa tête de ses derniers partenaires, parce qu'elle se dit que si c'est le cas, elle a certainement chopé ça dans les draps de quelqu'un, et qu'il faut qu'elle trouve le coupable. Elle ne pense pas que ce soit un herpès, il lui semble que c'est encore plus dégoutant que cette simple plaque rouge, avec des boutons et tout ça.

« Non, aucun effet. Mais je tente toujours le coup, "au cas ou..." ! »

Confirme-t-elle, tout de même surprise. Il doit avoir une petite idée derrière la tête concernant le diagnostic. Quelque chose qui serait en rapport avec l'aspirine et qui inclus le fait que ça ne lui fasse aucun effet. Aly sursaute légèrement quand elle sent la crème grasse et glacée se poser sur la plaque. Elle ne manque d'ailleurs pas de justifier la raison de son sursaut en murmurant juste que c'est froid et désagréable, sur le coup. Elle s'y habitue vite, puis ce n'est pas si désagréable, finalement.

« Non, je suis arrivée il y a à peu près trois ans. Avant ça j'étais à L.A, encore avant à Durham...Je ne suis arrivée aux U.S.A y'a six ans. »

Pas qu'elle soit certaine que tout ça l'intéresse mais elle cherche des pistes pour découvrir d'où ils se connaissent. Josh semble américain de souche, alors c'est forcément sur le territoire qu'ils se sont rencontrés (si ce n'est pas juste une impression). Elle laisse donc au médecin le luxe de trouver laquelle des villes citées elle a en commun avec lui, en dehors de Shady Cove, car elle est persuadée de ne pas l'avoir rencontré ici...C'est donc forcément L.A ou Durham. En y repensant, cette deuxième proposition serait la plus logique puisqu'il s'agit de la ville où elle a fait ses études de médecine, et il est médecin donc...

« Vous avez fait vos études où ? »

Il n’avait pas mis longtemps à trouver ce qui n’allait pas chez la jeune demoiselle et quelque part, ça le rassurait. Josh était un bon médecin. Il n’en avait jamais douté, mais étant donné que les patients se faisaient rares, il aimait avoir l’occasion de se prouver à lui-même qu’il n’était pas resté à Shady Cove, dans son petit cabinet privé, pour rien. Il l’avait parfois regretté, mais ses parents avaient vite eu raison de ses doutes. Il sourit largement lorsque la jeune fille lui annonça que l’aspirine ne faisait en général aucun effet, mais qu’elle tentait toujours le coup, juste au cas où, disait-elle.

« Et bien vous apprendrez avec joie que vous êtes plus que probablement allergique à l’aspirine. »

Décréta-t-il avec un ton presque trop joyeux. Après tout, ce n’était pas une mauvaise nouvelle. Quelques tests pour voir si c’était les composantes de l’aspirine en général, ou juste un élément en particulier, et l’affaire était dans le sac. Elle n’aurait plus jamais de problème de ce genre.

« Il faudra faire quelques tests cutanés pour en déduire l’origine même, mais quand vous avez mal à la tête, antidouleur basique, et plus d’aspirine pour vous ! »

S’il avait réussi à déduire ce dont elle souffrait et qui était à l’origine de ses plaques rouges sur la peau, Josh ne parvenait pas à savoir d’où il pouvait bien connaitre la jeune fille. Il n’avait jamais réellement quitté sa petite ville de Shady Cove. Sa première question fut donc de savoir si elle venait d’ici, mais si c’était le cas, il arriverait à la replacer dans une rue, à un événement. Il ne parvenait pas à la placer dans un contexte particulier, ce qui l’ennuyait vraiment très fort. Lui qui avait une mémoire d’éléphant.

Une lueur d’étincelle s’alluma dans ses yeux lorsque la jeune fille mentionna qu’elle passé un peu de temps à Durham. Avant de s’exclamer qu’il avait trouvé le lien qui les unissait probablement, il tâchait de savoir en quoi cette jeune fille avait un rapport avec ses études de médecine…

« Ici en partie, et aussi à Durham… Je pense qu’on a trouvé d’où on pouvait se connaitre. »

Cela ne lui apportait cependant pas le contexte. Il avait côtoyé très peu de personne à Durham. Il y avait les gens de son niveau avec qui il évitait en général les interactions, et puis il y avait eu des débutants à qui il avait dû donner cours puisqu’il fallait le dire, il se débrouillait drôlement bien. Une fois de plus, il vit défiler la vie de chirurgien qu’il n’aurait jamais.

« Où est-ce qu’on aurait pu se croiser à Durham ? Parce que j’y étudiais la médecine… et… »

Et fatalement, la jeune femme n’était pas médecin puisqu’elle était venue en consulter un pour connaitre l’origine de ses plaques rouges. Mais la bienséance l’avait empêché de prononcer si brutalement ces mots-là.

C'est bête. Une allergie à l'aspirine, elle aurait facilement pu le deviner si elle avait continué ses études de médecine. Des fois, elle se demande si elle regrette d'avoir stoppé son cursus pour se consacrer à la radio. C'était risqué de tout plaquer sans même avoir de pistes, d'opportunités. Mais elle l'a fait, parce qu'elle se sentait plus vivante que jamais quand elle était à l'antenne. Elle ne peut pas regretter d'avoir suivit son rêve, mais se dit parfois que sa vie aurait été radicalement différente si elle était allée au bout de ses études. Elle serait probablement chirurgien, pédiatre...qu'importe la spécialité, elle serait médecin.

« Joie, peut-être pas, mais au moins on sait d’où ça vient, maintenant ! »

Etre allergique à un médicament (ou l’un de ses composants) c’est une idée agaçante. Les allergies, en général, c’est chiant, alors quand il faut en plus faire attention à ne pas ingérer un truc qui pourrait déclencher une crise, ça devient vite saoulant. Elle espère presque être allergique à l’aspirine en général et non à l’un de ses composants, sinon, elle est bonne pour épier chaque notice de médicament pour s’assurer qu’il n’y a aucune trace de ce fameux truc qui lui provoque ces plaques rouges moches et qui démangent.

« Bien, c’est noté ! Plus d’aspirine…»

Il va falloir qu’elle se trouve un substitut en cas de maux de tête ou douleurs en tout genre. Elle ne doit pas être la seule personne sur terre à avoir ce type d’allergie, elle ne désespère donc pas quant à l’existence d’un médicament efficace et inoffensif pour sa santé.

Maintenant que le mystère de sa plaque est résolu, il en reste un : les deux adultes ont la terrible impression de s’être déjà croisés et pourtant, ils sont incapable de retrouver où, quand ou pourquoi. C’est frustrant. Et plus ils cherchent, plus l’animatrice sent qu’ils se rapprochent. Alyssa n’est pas originaire de Shady Cove, alors elle décide d’énumérer les villes dans lesquelles elle est déjà allée, histoire de voir si, par hasard ce serait son cas aussi. Et justement, ça semble l’être puisqu’il réagit lorsqu’elle évoque Durham. Il est évident, donc, que s’ils ne se sont pas rencontrés ici, c’est forcément là bas. Pour Aly, c’est évident, ils se sont forcément rencontrés à l’université ! Elle y a étudié lors de ses deux premières années de médecine. S’il était là bas et qu’il est aujourd’hui médecin, elle devine qu’il y a fait ses études, mais préfère s’en assurer.

«On s’est forcément rencontrés là bas ! J’ai commencé des études de médecine à l’Université de Duke ! Mais j’ai pourtant pas souvenir qu’on ait pu avoir des cours ensemble, on ne devait pas être dans la même promo, j’imagine… »