Christopher est dressé dans son lit. Les yeux écarquillés, la respiration haltante et le coeur battant à tout rompre, il a le regard fixé sur sa couverture, comme s´il tentait de s´accrocher à la réalité. Et finalement, il y arrive. Se rappellant qu´il est en sécurité dans sa chambre, à Shady Cove, et non sur le terrain de guerre Syrien, il soupire silencieusement en se laissant à nouveau tombers sur le lit. Les yeux fermé, il se passe une main sur le front, y essuie la sueur qui y perle. Prenant plusieurs profonde inspiratzion, il réussi peu à peu à se calmer. Puis, se tournant sur le côté, il espère à nouveau se rendormir.

Mais ses espérances sont mises à mal. À peine eu-t-il refermé les yeux que les images traumatisantes de la guerre lui reviennent en mémoire. Crispant les visage, tentant de penser à autre chose, il abandonne finalement. C´est donc, au bout de seulement 5 minutes, qu´il repousse sa couverture et s´assoit sur le bord du lit en soupirant. Il est 2h16 et Christopher sait, dès à présent qu´il n´arrivera plus à s´endormir. Alors, il se lève et sort de sa chambre.

Sans savoir comment, il se retrouve dans celle occupée par Morgan. Debout dans l´encadrement de la porte, il observe le plus jeune qui, allongé sur le côté, dort paisiblement. La respiration lente et régulière, il doit être entrain de faire un rêve bien plus agréable que le sien. Tellement plus agréable que Christopher ressent une pointe de jalousie, qu´il refoule rapidement. C´est tellement puéril d´en vouloir à Morgan de dormir tranquillement étant donné qu´ils n´ont pas le même vécu. Lentement, Christopher s´approche de l´anglophone et s´immobilise devant son lit.

"Morgan ...?" souffle-t-il

Bien qu´ayant parlé à voix très basse, la réaction du jeunot est imminente. Rouvrant les yeux, se redressant vivement, il étend la main pour allumé la lumière sur la table de chevet. Grognant légèrement, Christopher détourne le visage et ferme les yeux, plaçant en même dans sa main devant le visage, comme double protection. Clignant légèrement des paupières le temps que ses pupilles se soient habitués à la brusque luminosité, il se retourne finalement vers Merlin qui le regarde d´un air ahuris, comme s´il venait de voir la sainte vièrge descendre d´une soucoupe volante.

"Désolé .." s´excuse-t-il faiblement "C´est juste que ..."

Sa voix se brise tandis qu´il baisse le regard. Que quoi? Que j´arrive plus à dormir donc je te réveille parce que je suis égoiste? Que j´ai fait un cauchemar et maintenant j´ai peur du noir? Christopher se passe une main, encore quelque peu secoué par les vestiges de tremblement, sur le visage et dans les cheveux en soupirant. Il est vraiment pitoyable quand il s´y met ...

Des plaines verdoyantes, passant à des montagnes sombres et acérées, couronnées quelques fois de neige, puis des grands lacs tout aussi sombres, aux teintes variables selon les nuages, et pour finir un fjord, profond, à pic... Ces rêves-là, magnifiques, apaisants, Morgan ne s'en souviendra pas au matin. Il ne lui restera juste qu'un sentiment de doux repos. Le calme. Juste le calme. Cela n'a pas de prix. Son lit est confortable qui plus est, ce qui ne gâche. Son sommeil n'est plus que rarement perturbé par de douloureux cauchemars, c'est une chance. Il en faisait beaucoup quand il était petit, puis ça c'était calmé, et ça avait repris quelques temps lorsque son frère était entré à l'université. Mais maintenant, tout allait bien.

Contrairement à une certaine personne, qui d'ailleurs le réveilla. Son prénom vint de loin, comme du fond des âges, mais Morgan reconnu inconsciemment la voix de Christopher et réagit sans attendre. Bien sûr, cette information ne daigne pas remonter jusqu'à sa pensée consciente. Ainsi, lorsqu'il allume d'un geste expert la lumière sur sa table de chevet, il est à un stade bien supérieur à l'ahurissement. Il se demande sérieusement s'il est en train de rêver. Très sérieusement même. Les paroles de Chris sont lointaines et faibles, Merlin comprend qu'il s'excuse, ou qu'il essaye du moins, mais il n'en a rien à faire. Il est encore à moitié dans les vappes. Voire même totalement.

En fait, il en a encore à : est-ce que je rêve, ou pas ? Se frottant le coin de l'oeil avec le poing, et avec lassitude, il cligne plusieurs fois des yeux, avant de se mettre à genoux sur le lit, face à l'intru. Se redressant et se penchant un peu en avant, il tend la main. Celle-ci rencontre bien entendu le torse de l'américain, enlevant les derniers doutes à Merlin concernant sa propre santé mentale. Chris est, à première vu, normal. Torse nu, avec un simple pantalon de nuit sombre. Normal. Cependant, l'oeil expert du britannique repère tout de suite les mains légèrement tremblantes, la sueur collant encore quelques boucles au niveau des tempes. Il l'observe en détail, cherchant l'erreur. Qui est l'homme face de lui et qu'a-t-il fait de son Christopher ! Trêve de plaisanterie, quelque chose ne va pas, c'est clair. Comme de l'eau de roche.

— Chris, qu'est ce qu'y a.. ? demande doucement le brun, la voix encore un peu éraillée de sommeil.

Il abaisse en même temps sa main et s'assoit sur ses talons. Mais, lui se refuse à passer une main dans ses cheveu corbeaux. Il doit avoir une tête de — adorable — hérisson pas réveillé, autant ne pas aggraver les choses. William et Christopher partagent les boucles, Morgan lui, n'a que la couleur en commun avec son frère. Ses cheveux sont droits, pas si fins que ça, professionnels du je-fais-ce-que-je-veux et de la coiffure-du-matin-qui-prouve-que-t'as-bien-dormi. Chez lui, on voit la différence entre coiffé et pas coiffé. Finalement, après avoir fixé Chris un long moment, il ne peut résister à l'envie de savoir l'heure qu'il est. Se penchant vers sa table de chevet, il déverouille son portable, regarde l'heure, puis sourit faiblement en coin en revenant porter toute son attention que l'ancien militaire.

— Tu m'as pris au mot à ce que je vois... C'est bien... dit-il gentiment, sans la moindre trace de reproche.

Christopher est sur le point de se détourner et de laisser son colocataire se rendormir paisiblement, lorsqu´il sent la main du plus jeune se poser sur son torse. Un long frisson lui parcour alors l´échine et son coeur s´accélère brusquement. Ces doigts qui effleure sa peau nue ne sont pas sans effets et ne le laisse pas indifférente. Déglutissant, l´américain s´efforce de respirer tranquillement, calmant par la même occasion les tremblements dans ses mains ainsi que les rapides battements de son coeur.

Morgan prend la parole, lui demande ce qui ne va pas. L´ancien militaire baisse la tête, détourne le regard, se mordant sur la lèvre inférieure. Que devait-il répondre? D´ailleurs, quelle était la réelle raison de sa venue ici, en pleine nuit? Son cauchemar? Sans doute. Ignorant la seconde prise de parole du jeune irlandais, Christopher s´avance d´avantage et, se tournant, s´assoit sur le bord du lit. Le regard rivé au sol, les mains sur le matelat, l´américain laisse silencieusement passer plusieurs instants, voire minutes, avant de se décider à briser le silence.

"La guerre ..." commence-t-il en un souffle avant d´hausser légèrement la voix "C´est la pire des choses que j´ai vécu ..." il se penche en avant, pose ses coudes sur ses genoux et son front dans ses mains "Tu ne peux pas t´imaginer à quel point. A travers mes jumelles je voyais tout ce qui se passait et .. je .." sa voix se fait plus hésitante. Il pince les lèvres, dégluti, prend une profonde inspiration, se donne du courage, et reprend "Je n´étais que simple spectateur mais je voyais tout ..." il ferme les yeux et secoue légèrement la tête "Tout"

Sa voix se brise à nouveau alors qu´il se rend compte de ce qu´il est entrain de faire: il parle. Du sujet qu´il a enfouit au plus profond de lui. Le sujet qu´il s´est interdit d´evoquer et qu´il remet, maintenant, devant le jeune Morgan au grand jour. Et pourtant ...

"A cause du vent j´entendais tout. A cause des jumelles je voyais tout" il rouvre les yeux "J´entendais et je voyais les bombes exploser au loin. Je voyais mes camarades de l´armée de terre tomber les uns après les autres. Je voyais et entendais leur agonie. Je les voyait prier pour que la mort achèves leur souffrance. Je ..." Il dégluti, soupire et se prend la tête entre les mains, refermant les yeux "Je n´ai rien pu faire. Je n´en n´avais ni la capacité physique ni mentale. Je n´étais pas entrainé pour ça ..." il refoule son désespoir "J´ai vu les pires misères que la vie peu offrire ..." finit-il en un souffle.

C´est dur. Très dur. En parler le met face à la réalité de la chose. Les images lui reviennent tels des flashback. Insupportable. Il a envie de se lever, se frapper la tête contre le mur, faire cesser sa mémoire. En parler, est-elle réellement la solution à ses problèmes? Pour l´instant, le contraire évident se produit. Mais il est lancé.

Après une évidente gêne, Christopher vient s'assoir au bord du lit. Silencieux, le regard rivé sur le sol comme si les mots qu'il cherche y sont inscrits. Morgan ne s'aventure pas à briser ce silence, gardant un regard légèrement inquiet sur lui. Il lui laisse le temps de réfléchir. Vu sa tête, il en a clairement besoin. Plusieurs hypothèses se forment pendant ce temps dans la tête du jeune homme, sur les raisons qui ont poussé l'américain à venir le réveiller en pleine nuit. Il se doute que ce n'est pas joyeux. Un cauchemar sans doute ? Si c'est ça, et c'est sûrement ça, cela concerne forcément son passé militaire.

Et il ne se trompe pas en pensant cela. Après quelques minutes de silence total, Chris prend la parole. Sa voix n'est d'abord qu'un souffle, mais les deux seuls mots qu'il prononce font comprendre au britannique que le sujet va être bien sombre et torturé. Le plus jeune ne coupe pas son aîné lorsqu'il parle de son expérience de la guerre. Les mots sont simples, les phrases courtes, mais rien qu'avec ça, Merlin ressent une vague de pure compassion l'envahir. Si seulement... Si seulement il pouvait soulager Christopher de tout ça, de toutes ces horreurs. Il a vu, connu, ressenti, bien trop de chose pour une seule vie. Lorsqu'il s'arrête de parler, Morgan s'est, sans s'en rendre compte, approché de lui. Le brun, toujours à genoux, le regarde inlassablement courbé, la tête dans les mains. Comme si tout le poids des conflits pesaient sur ses épaules.

Puis le récit reprend, saccadé. Mais là. Christopher s'épanche succinctement sur ce qu'il a connu. Sur cette partie-là de ses souvenirs. Sur ses faiblesses. Mais ce n'était pas son boulot. Son devoir à lui, ça n'était pas d'être sur le terrain. Pourtant, c'est aussi dur pour lui, sinon plus, d'en parler. Il faut bien qu'il fasse son deuil, néanmoins, et ce n'est pas en refoulant inlassablement ses mauvais souvenirs qu'il s'en débarassera. Au contraire, ils seront toujours là, fauves tapis dans l'ombre, n'attendant que leur heure pour attaquer. Malgré tout ce que lui vient en tête, tous les frissons qui lui glacent le sang, Morgan se tait. Il a posé une main hésitante sur l'omoplate de Chris, puis, après quelques instants, il a commencé quelques caresses le long de son dos. Légères, douces, rassurantes.

Lorsque l'ancien militaire redonne de la place au silence, le brun le respecte. Ensuite, sa main revient sur l'épaule de Chris, la pressant légèrement. S'asseyant correctement à son tour, Morgan laisse un élan lui dicter ses mouvements, comme ce fameux jour du bureau, et se retrouve à le prendre dans ses bras. Cette fois-ci, c'est l'aîné qui est appuyé contre le plus jeune. Ce dernier dépose un baiser dans la masse de cheveux bouclés, puis ferme les yeux en posant sa joue contre sa tête. Il n'a rien dire. Honnêtement. Quel mot pourrait-il utiliser après ça ? Il ne le comprend pas, il n'a pas été à sa place sur le navire, ou de l'autre côté de ces jumelles. Mais il compatit. Il essaye. Il ne sait pas vraiment ce qu'il ressent, comment il pourrait qualifier ça. Toujours est-il que si Chris se met à pleurer, il ne pourra pas non plus s'empêcher de verser quelques larmes. Cependant, un petit quelque chose passe la barrière de ses lèvres. Un murmure, un chuchotement, des paroles dites à voix basses.

— Rien n'est de ta faute, rien non plus ne change par la volonté d'un seul homme. La guerre est, a été, et sera toujours une réalité stupide. Elle a pris bien des vies, mais je ne la laisserais pas pendre la tienne.

Il ne reconnaît pas sa propre voix, le pauvre garçon. C'était la seule chose qui lui était passée par la tête. Et il n'a plus eu envie de se taire. Il se demande s'il n'existe pas des remèdes de grand-mère pour les cauchemars. Des remèdes de druide, ça peut marcher aussi. Une main dans son cou et une autre à son épaule, Morgan n'est pas décidé à lâcher Christopher. Même si ce dernier est torse-nu et que, malgré son t-shirt trop grand pour lui, le britannique se sent agréablement électrisé. Mais il n'y pense pas, ça n'est pas le moment. Il y des choses plus graves, comme le bien-être de Chris, sa santé mentale, et ses maudits cauchemars qui vont devoir faire gaffe à leurs fesses s'ils ne veulent pas rencontrer un Merlin en colère.

Christopher a le regad rivé sur le sol. Ses pensées sont tourné vers la guerre. Il et tellement prit par ses souvenirs qu´il trésaille violement lorsque Morgan pose une main sur son omoplatte. Lui caressant tendrement le dos, il respecte son silence. Chirstopher frisonne. Non seulement à cause de la fraîcheur de la chambre et de cellle des doigts de Morgan, mais bel et bien à cause des caresses de ce derniers. Alors, s´approchant presque instinctivement du plus jeune, Christopher profite de cette tendresse propre à l´anglairs. Et avant même qu´il s´en apperçoive, il se retrouve blottit contre le torse de Merlin.

S´accrochant à lui comme il s´accrocherait à la réalité, l´anicen premier maître ferme le syeux. Ses concentrant sur la respiration du plus jeune pour calmer la sienne, il l´écoute parler. Et encore une fois, ses paroles semblent avoir ne signification tellement particulières qu´elles en sont életrisantes.

"Moi non plus ..." souffle-t-il en rouvrant les yeux, gardant tout de même le regard baissé "Moi non plus je n´ai pas envie que ces cauchemar régissent ma vie" il pose sa main sur les reins de Morgan "Mais je ne sais pas quoi faire ..." il dégluti "Je ne sais même pas si en parler y changera quoique ce soit." Il pince les lèvres, secoue la tête et resserre furtivement son étreinte "Morgan ...?" Lentement, il relâche le britannique et se redresse un peu "Est-ce que je peux dormir ici, cette nuit ...?"

La fin de sa phrase se fait hésitante et se fini en un murmure incertain. C´est puéril. C´est enfantin. C`est pareil à un gamin qui n´arrive pas à dormir dans sa chambre à cause du monstre caché sous son lit. Le sale gosse qui dérange ses parents en plein milieu de la nuit. Sauf que ce n´était pas un gamin. Là, s´était un jeune homme de 29 ans et plusieurs monstres dans sa tête.

Morgan, malgré la charge émotionnelle du moment et le sujet loin d'être réjouissant, ne peut s'empêcher de sourire légèrement lorsque Chris se raccroche à lui, contre son torse. Les rôles s'inversent, il y a peu, c'était lui qui était réfugié contre l'aîné lors de leur rencontre avec le chien des voisins. Toujours tendre, le jeune homme continu quelques caresses, en parlant doucement. Les yeux fermés, il laisse parler son coeur et visiblement, cela touche l'ancien militaire. Celui-ci acquiesce, il n'a pas non plus envie de subir incessamment ces cauchemars.

Une main vient se poser sur la hanche de Merlin et celui-ci retient un frisson. Un léger tressaillement le prend, mais il n'y prête pas plus attention, se concentrant davantage sur les paroles de Chris. Il aimerait bien l'aider encore plus. Il aimerait bien lui assurer qu'en parler changera les choses. Il aimerait lui dire que ça va finir par se tasser, ne plus le tourmenter autant. Il aimerait le lui dire, et il aimerait que ce soit vrai. Lorsque l'on est enfant et qu'une grande personne nous dit que tout va bien aller, on y croit. Quand on grandit, on perd cette crédulité. Même si les dires sont vrais, on doute.

Puis lorsque Chris, en se détachant un peu et en se redressant, demande s'il peut dormir ici, Morgan ne cache pas son étonnement. Regardant l'américain, ses sourcils s'arquent naturellement. Quelques courtes secondes passent avant qu'il n'assimile la question, et un grand sourire s'empare finalement de ses lèvres. Cet homme est une énigme, une énigme parfois adorable, parfois effrayante. C'est amusant d'un côté. Bizarrement, ça lui rappelle lorsqu'il était enfant et qu'il allait se réfugier dans la chambre de William. Il hoche doucement la tête, ne perdant pas son sourire pour autant.

— Oui, bien sûr, répond-il doucement.

Il jette ensuite un regard au lit, se dit furtivement que c'est une chance que ce dernier soit plutôt grand, puis remonte au niveau des coussins. Ses yeux recroisent ceux de Christopher, et, avec un nouveau sourire, glisse ses jambes sous la couette. Il était bien au chaud, tout à l'heure. Et là, il va devoir réchauffer sa place sur le matelas. Quoique, si Chris est à proximité, cela ne devrait pas prendre trop de temps. Le brun se fait surprendre par un fort bâillement, qu'il masque du dos de la main. Les larmes au coin des yeux, un énième sourire sur le visage, Merlin tapote du plat de la main la place libre à côté de lui, en se décalant quelque peu.

— Allez viens, je suis fatigué moi... dit-il en rigolant doucement. Oh, et j'éteins la lumière, ou pas ?

Christopher est bien tenté de repartir instantanément après sa question. Mais la réponse positive de Morgan tous comme le souvenir de ses douces et chaleureuse caresses, le retiennent sur place. L´ancien militaire se sent bien dans les bras de l´anglais et ... puis rien du tout. Il ressent juste cette pure et merveilleuse envie de ne pas le lâcher. Il ressent le désire suprême de rester là, dans le lit, blottit contre le torse du jeune homme. Et lorsque Morgan le lâche pour remonter vers l´oreiller puis de réprime un baillament derrière le dos de sa main, Christopher ne peut détacher son regard de ce jeunot.

Ces cheveux noirs sont emmélé et complètement ébouriffé, accentuant l´air fatigué sur son visage. Il a une sale tête, la tête de l´ogre pas réveillé. Pourtant, Morgan est mignon. Très mignon. Adorable, même. Ses yeux reflètent, certes, sa grande fatigues, mais il semble à l´ancien militaire que ces même yeux on une lueur malicieuse. Ou quelque chose de ce genre.

Enfait, Christopher ne sait plus trop réfléchir. En voyant le petit jeune entrain de bailler à s´en décrocher la mâchoire, l´ancien premier maître ne peut s´empêcher de bailler lui même. Morgan vient de lui rappeller l´heure qu´il est. À 2h30 du matin on est en plein sommeil. Pas étonnant que la fatigue rattrape nos deux compères.

Alors, souriant doucement, l´américain se lèves pour aller se coucher à côté de Morgan. Remontant la couverture vers lui, il se tourne pour éteindre la lumière, répondant ainsi à la question du plus jeune avant de se rapprocher de ce dernier.

"Merci" souffle-t-il

Et avant même qu´il ne sache pourquoi, ni comment ni même ce qui lui prend, il sent les lèvres de Morgan contre les siennes, liées en un doux baiser. Le genre de baiser que les amoureux se donnent pour se douhaiter bonne nuit. Celui qui est emplie d´une tendresse sans nom et qui, pourtant, est profondément excitant. Le genre de baiser que, si on le fait durer plus longtemps, éveillent des sentiments en nous, nous enflamme et nous donne envie de plus. L´esprit de Christopher hurle sa détresse, injure son propriétaire de la faute qu´il vient de faire. Son coeur à envie de plus et, avec ses battements accéléré, fait naître un sentiment nouveau au fond de notre ancien militaire.

Nouveau, mais pas inconnu.

Morgan n'aurait jamais pensé en arriver là. Que Chris ai fait un cauchemar, soit. Qu'il lui en ai parlé, okay. Dans sa chambre, d'accord. A 2h et des poussières du matin, ça passe. Qu'il demande à rester dormir, en revanche, c'était plus surprenant. Cependant, le brun ne met pas longtemps pour accepter. Si cela peut aider l'ancien militaire, pourquoi pas. Et puis, il fait preuve d'égoïsme, pour une fois. Sa fatigue se rappelle à lui par un bâillement. Et, tout au fond de lui, il n'a pas envie de quitter tout de suite les bras de Christopher. Ce dernier aussi baille par mimétisme, puis vient s'installer à côté de Merlin avec un sourire. Il éteint ensuite la lumière, tandis que le britannique se glisse complètement sous la couverture.

Ce n'est pas parce que Chris est venu le réveiller à 2h du matin qu'il n'a pas envie de dormir. Maintenant il espère bien continuer sa nuit. Il sent l'américain se rapprocher, et il en fait de même instinctivement. Il sourit en entendant le "merci" chuchoté par l'ancien officier. Ça vaut tout l'or du monde. S'habituant à l'obscurité, il a une dernière vision de l'aîné, avant de fermer les yeux et de... Les rouvrir brusquement. Il n'a pas le temps de réfléchir plus, pas le temps de comprendre. Il sait juste ses propres lèvres sont liées à celles de Christopher. Comment, il ne saurait l'expliquer. Il referme les yeux et rougit immédiatement en réaction au baiser. Ses sens s'enflamment, comme si un brasier naissait quelque part dans sa poitrine, répandant ses flammes dans tout son être petit à petit.

Pourquoi ? Pourquoi un baiser le met dans cet état-là ? Certes, il n'a pas beaucoup d'expérience dans ce domaine, mais c'est seulement Christopher ! Un homme qui plus est. C'est peut-être pour ces raisons que ça le chamboule. Mais pourquoi d'ailleurs a-t-il décidé de l'embrasser ? Ça n'a pas de sens. Ils ne sont pas... Ni l'un ni l'autre. Alors, pourquoi autant de tendresse en si peu de secondes ? Des questions, pas de réponses, et son corps qui bouge seul. Morgan n'a conscience d'avoir posé une main sur le torse de Chris que lorsqu'il oubli en peu ses si douces lèvres. Bien trop douces de surcroît. Sa main, on dirait qu'elle souhaite repousser l'assaillant, mais la pression qu'elle exerce n'est délibérément pas assez forte pour le vouloir vraiment. La raison et le coeur qui s'affrontent.

Reprenant ses esprits, ou rassemblant le peu qui lui reste, Merlin met fin au baiser. Ou plutôt, ils se reculent légèrement tous les deux, restant à portée de souffle, encore sous le choc du geste. Le brun rouvre les yeux, comme s'il s'éveillait d'un rêve.

— Chris... souffle-t-il d'une voix lointaine et quelque peu troublée, reflétant parfaitement son état esprit.

Il a oublié comment penser. Son regard se baisse machinalement sur les lèvres qui ont capturé les siennes, puis sur sa propre main qu'il retire en un soubresaut. Heureusement que la pénombre cache ses joues, il est sûr de rivaliser avec une fraise bien mûre. Il ouvre la bouche, mais les mots se bloquent dans sa gorge. Muet comme une tombe, gêné au plus au point, il aimerait parler, dire n'importe quoi. Mais il n'y arrive pas. Trop de questions, et quelque part, il n'a pas envie d'en savoir les réponses, de peur d'être déçu.

C'est nouveau, inconnu, tentateur, interdit.

Le cœur à ses raisons que le cerveau ignore. Non mais putain ! Qu’est-ce qui lui a prit ? Sérieusement. Qu’est. Ce. Qui. Lui. A. Prit !? Quelle mouche l’a donc piqué pour qu’il fasse cette bêtise ? Pourquoi donc s’est-t-il retrouvé accroché aux lèvres de ce jeunot ? Un Homme ! Putain. Morgan est un homme ! C’est interdit. Mais ce qui est interdit est excitant. Mais ça reste interdit et punit par la loi.

Reprenant ses esprits, Christopher se détache subitement de Morgan, le fixe, ahuris. Malgré l’obscurité, il sait que le jeunot est tout aussi surpris –pour ne pas dire complètement choqué …- que lui-même. Et c’est tellement compréhensible. Putain de merde. La voix de Morgan est lointaine. Il chuchote son prénom sur un ton à lui glacer le sang dans les veines. Mais en même temps, ce ton le sort de sa torpeur. Repoussant d’avantage le jeunot, se reculant, il se redresse.

« Désolé. Ce n’est pas voulut. C’est … »

Il n’en dit pas plus, se lève, sort de la chambre, s’enferme dans la sienne. Encore une fois, il fuit ses responsabilités. Une fois la porte refermé derrière lui, il s’y appuie, posant son front contre le bois et ferme les yeux. D’un geste tremblant, il effleure ses lèvres de ses doigts puis les retire vivement, comme s’il venait d’avoir une décharge électrique. La respiration et les battements de cœurs accélérés, il referme les yeux, déglutissant et refoulant sa panique et sa paranoïa grandissante. Crispant le visage, il se cogne plusieurs fois le front contre la porte, jurant entre ses dents, se traitant de connard, d’enfoiré, d’égoïste et d’autres noms d’oiseaux tout aussi charmant.

En l’espace de quelques secondes, il a gâché une amitié grandissante et sincère, ainsi qu’une colocation explosive mais tellement divertissante et géniale. Et c’est là que Christopher reprend brusquement ses esprits. Ecarquillant les yeux, il gémit légèrement. Les prochains jours, prochaines semaines, peut-être même prochains mois seront horribles et sans doute insupportable. Peut-être même sera-t-il amené à virer Morgan de chez lui. Et tout ça a cause d’un acte irréfléchis. Un putain d’acte irréfléchi et interdit.

Mais un acte tellement tentant et excitant.

Christopher s'enfuit. Dans son ton, dans ses gestes. Même à travers la pénombre, Morgan le sent : l'américain est, outre surpris, complètement choqué par son propre geste. Comme touché par la foudre, Chris se recule encore plus et se redresse, réanimé par la voix du britannique. Il n'a dit qu'un mot, mais c'est tout ce qu'il a pu dire, en fait. L'ancien militaire s'excuse rapidement, dit qu'il ne voulait pas, mais sa phrase meurt avant d'être terminée. Puis il se lève et sort rapidement. Le brun allait dire quelque chose, mais finalement, non. Ça ne servirait à rien. Il n'y a rien à dire. Après un baiser comme celui-ci, sur un coup de tête mais sincère, on ne peut rien dire. Christopher s'enfuit.

Il peut le comprendre. Il le comprend. Morgan a l'impression qu'il regrette profondément de l'avoir embrassé. Au fond, pourquoi a-t-il a fait ça ? Merlin sent son coeur se serrer. Quelque chose ne va pas, définitivement. Il ressent tant de sentiments en même temps, il en a la tête qui tourne. Il se réinstalle sous la couette, replié sur lui-même. Il essaie de contenir ses tremblements. Il n'a pas froid pourtant. Ses pensées tournent et retournent dans sa tête. Il ne sait pas ce que tout ça signifie, il n'a rien pour comparer. Une chose est sûre, il est perdu et chamboulé. Et quelque part, un peu triste que Christopher regrette son geste. Ou n'assume pas simplement. Certes, leur colocation est peut-être ruinée, elle ne sera plus comme avant, mais... Mais même.

En fait, c'est cela qui chagrine le plus. Leur amitié ne s'en relèvera peut-être pas. Peut-être que, en quelques secondes, par un acte irréfléchi, a été signée la fin de leur cohabitation. Tout c'était bien passé, ils avaient appris à se connaître, à vivre ensemble. C'était marrant, vraiment. Si cela doit se finir ainsi, Morgan n'oubliera pas. Mais il n'a pas non plus envie que cela se termine. Il s'est attaché à Chris, mine de rien. Or, il faut se rendre à l'évidence, les prochains jours, semaines, mois éventuellement, seront placés sous le signe du malaise. Le britannique ne veut pas partir. Il irait où ? Ses pensées sombres lui enserrent le coeur, ses yeux le piquent. Il pleurerai s'il avait des larmes à verser, mais il est trop perturbé pour ça. Et le sommeil que le fuit pendant facilement deux heures... Quelle vie de merde.