"Fait pas chaud aujourd'hui." C'est approximativement la première chose que Morgan s'est dit en mettant le nez dehors. Il ne fait pas la fine bouche quant à porte son bonnet et son écharpe. C'est devenu indispensable par ce temps. Christopher l'a obligé à retourner en cours, après deux jours manqués et un week-end de passé. Il l'aurait limite traîné par la peau du cou. L'anglais avait protesté, mais rien à faire. Si lui l'avait senti passé niveau mental, son amant avait beaucoup souffert physiquement, et il voulait être là pour lui, sachant qu'il souffrait toujours. Les coups de John ont été plus puissants qu'il n'y paraissait au premier abord. Ainsi, les côtes ont pris cher, une migraine s'est étendue sur bien deux jours, mais la mâchoire n'a eu qu'une belle marque.

Inutile de dire que Chris n'a pas bien dormi, et par extension, l'étudiant non plus. Le sentir se tourner et retourner n'a pas aidé à un sommeil profond. Sans compter qu'il a dû s'occuper de lui, en plus du reste. La grosse baisse de moral après la visite de son père, tout ce fouillis dans sa tête, la lutte pour convaincre cet ancien militaire buté de voir un docteur... A cause de tout ce qui s'est passé en huit jours, finalement, Merlin est fatigué. Mais pas la petite qui passe après une bonne nuit de sommeil. La fatigue des nerfs. Il prend tellement sur lui depuis quelques temps que ça l'épuise sans qu'il ne s'en rende vraiment compte. Et quand il a un petit coup de barre, il se dit que ce n'est rien et agi toujours comme avant : avec le sourire.

Cette journée de cours fût plus ou moins longue, surtout les trajets. Il n'a pas arrêté une minute de penser à Christopher, s'attirant par là même les taquineries de son ami. Finalement, en arrivant à Shady Cove, il pousse un soupir de soulagement. Sans savoir ce qui l'attend... Malgré la météo largement plus supportable que ce matin, Morgan presse le pas. Il s'est retenu d'envoyer le moindre sms à Chris, et à présent, quelque chose lui dit que cet idiot à profiter de son absence pour sortir. En arrivant à la maison, les clés déjà sorties, il ouvre la porte. Un coup d'œil dans l'entrée lui indique que son amant est bel et bien sorti.

Cet abruti va l'entendre quand il rentrera. Dans son état, si ce n'est pas pour aller chez le médecin, il doit rester au chaud à l'intérieur. Soufflant pour se calmer, et se rappeler que depuis quelques jours, l'ancien militaire n'a pas franchement pris l'air, il referme la porte derrière lui. Il ne met pas longtemps à se débarrasser de sa veste, de son bonnet, de son écharpe, et à filer dans la cuisine. Cependant, il n'a que le temps de déposer son sac sur la table qu'il entend qu'on ouvre la porte. Immédiatement, il tourne les talons, retourne dans l'entrée, les poings sur les hanches.

— Qu'est-ce que tu faisais deh- commence-t-il, légèrement en colère, avant de se couper brusquement en apercevant la deuxième personne. A la vue de William, ses yeux s'écarquillent et sa bouche s'ouvre en grand. Il n'y croit pas.

William Smith, 28 ans.

Christopher ose le traiter de poule mouillée, mais William aimerait bien le voir à sa place. Juste pour s’amuser un peu. Partir cinq ans, du jour au lendemain, n’accepter aucun contact, et revenir comme une fleur. Le britannique est, sans doute pour la première fois, mis au pied du mur. Il va devoir faire face à son petit-frère, et craint énormément sa réaction. Au final, s’il suivait la logique qui lui est propre, Morgan n’est ni plus ni moins qu’une faiblesse. Il ferait n’importe quoi pour lui. Quiconque à la main sur le cadet contrôle l’aîné. Quoique ce dernier utiliserait toutes les astuces possibles et imaginables pour libérer son frère sans se rendre lui-même. Et être assujetti à ça a sûrement dû jouer dans son envie de liberté, lui qui n’aime pas les sentiments, qui n’aime pas avoir du cœur.

Morgan est le seul capable de faire ressortir des choses qu’on croirait inexistantes chez William. A son plus grand désarroi. Puis viennent les autres, Chris étant très bien placé dans ce classement. Cet américain essaie d’ailleurs de le détendre un peu, mais c’est loin de marcher. De toute façon, il redevient bien vite sérieux en lui répondant ce qu’il pense de la réaction que son cadet aura. Ou plutôt des réactions. Les deux amis pensent la même chose à ce sujet. Will se doutait de ce que l’ancien militaire allait dire, mais l’entendre de vive voix le rassure autant que cela l’inquiète. Son frère est sensible, et peut avoir de fortes réactions. Il se souvient par exemple que lorsqu’il est parti étudier à Harvard, le petit l’a mal vécu. Un Morgan violent ne l’étonnerait pas, bien qu’il ne l’ait jamais vu frapper quelqu’un avec sérieux et/ou avec rage. Ça pourrait bien lui tomber dessus. Et puis les pleurs, c’est une étape obligée avec lui. Comme le souligne Christopher, et malgré ce que pense leur père, ce n’est pas forcément une marque de faiblesse. Au contraire, Merlin a une grande capacité à pardonner.

— C’est un ange ce gamin, souffle-t-il avec léger sourire, lors de la pause de Christopher. Puis lorsque celui-ci reprend en lui disant comment se conduire, William hoche la tête, lui lançant tout de même blasé. Je sais encore comment me comporter face à la colère de mon petit-frère. Redevenant impassible, il précise quand même : De toute façon je n’aurais pas la force de démentir ce dont il m’accusera.

Puisque Morgan aura complètement raison. Peu importe comment il pourrait se justifier, William est en tort. Au moins pour ce qui est de la durée. Il aurait pu renouer le contact plus tôt. Il disait toujours à Morgan qu’il l’aimait. Il le lui faisait comprendre plutôt, mais le cadet le savait d’instinct. Will l’a toujours rassuré en lui disant qu’il ne le quitterait jamais. Que même loin, il l’entendrait, et qu’il viendrait. Qu’il ne le laisserait pas une fois seul, qu’il serait là peu importe les circonstances. Même pour lui il est impossible de savoir le nombre de fois exact où il a prononcé ces mots. Il y croyait aussi à l’époque. Ça a été un déchirement pour lui de prendre la décision de partir, mais il ne pouvait faire autrement. Il n’a même pas essayé de se mettre à la place de son frère. Il n’a pas eu besoin de ça pour ne pas dormir la nuit à cause de la culpabilité. Mais comme tout, c’est passé. La seule chose qui reste, c’est qu’il n’a pas tenu ses promesses. Et ça lui revient plus ou moins fort à la gueule. Il n’empêche qu’il ne manque pas de répondre à Christopher comme il se doit.

— Je sais où tu as mal, je n’aurais aucun mal à me défendre, rétorque-t-il, impassible.

Son ami a l’air d’oublier que, à l’inverse de Morgan, Will a de très bons réflexes, et surtout de solides bases en arts martiaux. Mais il le suit bon gré mal gré. Il a déjà réfléchit un nombre incalculable de fois ce qu’il pourrait dire à son frère, mais tout lui paraît insipide et affreusement grotesque. Les derniers mètres passent trop vite à son goût. Il essaye de se détendre un peu en observant la maison, mais n’a plus le loisir de le faire une fois entré. Alors que Chris est passé devant, lui entre en suite et referme la porte. Tournant les yeux en entendant la voix de Morgan, il s’attend au pire. Mais c’est d’abord le calme avant la tempête. William ne prononce pas un mot, il est en incapable. Ses traits s’adoucissent, son regard se fait étonné, son armure se baisse légèrement. Comme il a grandi...

Christopher est surement un peu trop dur avec son ami en le traitant de poule mouillée. Lui-même ne peut même se mettre à sa place car en tant que fils unique il ne se trouvera jamais dans cette situation. Mais voilà, son ami ne mérite pas meilleur traitement, après tout le mal qu´il a put faire à Morgan. Ainsi, Christopher parle ouvertement, ne lui chachant pas qu´il y a de fort risque que Morgan réagisse violement, lui donnant même des conseils comment il devrait réagir, lui. Il est évident que William se montre blasé lorsqu´il dit ça et ne se prive pas de faire une remarque sur ce sujet. Pour toute réponse, l´ancien officier affiche un sourir. Un sourire qui reste même sur ses lèvres lorsqu´il referme la porte derrière lui, qui s´amenuise légèrement lorsque William parle de savoir frapper oú il a mal et qui disaparit finalement complètement lorsqu´il entend la voix forte puis étranglée de son amant.

Il ferme furtivement les yeux puis, soufflant doucement, il se tourne pour faire face à un amant choqué. Choc qui, pourtant, fait bien trop rapidement place à la colère. La vraie. Telle que Christopher ne l´a vu qu´une seule fois sur le visage de son amant après la fête de la jonquille. Mais ce changement est brusque et bien trop rapide. Sans doute que MOrgan ne réfléchit pas car il s´avance d´un pas rapide vers eux, voire cours carrément en leur direction. Christopher, dont l´instinct de protéction fait brusquement surface, se place devant son ami. Tendant les bras, il intercepte soudainement les épaules de son amant, le retenant pour par qu´il ne puisse s´approcher d´avantage d´eux. Mais c´est sans compter sur ses côtés qui protestent brillament sous l´onde de choc qui se répend dans ses bras. Serrant les dents, il crispe le visage, étouffe un gémissement, mais garde le regard rivé sur celui de son amant.

"Doucement Morgan" dit-il, s´étonnant furtivement de son propre calme "Je sais que tu dois avoir envie de refaire le portrait de ton frère, et je t´y autorise aussi. Il le mérite." il lance un rapide coup d´oeil vers au-dessus de son épaule vers William, puis reporte son attention sur Morgan et s´douçit "Mais s´il te plait, ne fait rien que tu risques de regretter plus tard, ok?" Il lui sourit gentiment puis lui relâche les épaules et fait un pas sur le côté. Son regard passant d´un anglais à l´autre, Christopher hoche une fois la tête "Vous avez besoin de parler, seul. Je suis en haut dans ma chambre." il pose son regard sur Morgan, l´observe avec une légère moue inquiète avant de s´avancer et, lui attrapant le menton, lie rapidement leur lèvre en un furtif et doux baiser "n´hésite pas à le frapper de ma part aussi" lui souffle-t-il doucement de maniére à ce que seul son amant ne l´entende.

Puis, il se redresse. Après un dernier regard dur vers William, lui intimant silencieusement de ne rien faire qui pourrait nuir à la santé de son chéri, Christopher se détourne et monte lentement, sous l´emprise de douleurs, les escaliers. Les deux ont besoin d´une discussion privée. Lui-même ne ferait que de les gêner avec sa présence.

Son cerveau a arrêté de fonctionner dès qu’il a vu William. Morgan n’en revient pas, il est coulé sur place, incapable e dire, faire, penser quoique ce soit. Cela fait plus de 5 ans qu’il n’a plus parlé à son frère, mais cela fait plus longtemps qu’il ne l’a pas vu. Sans compter que la dernière qu’il l’a vu en chair et en os, c’était il y a approximativement 8 ans, avant qu’il ne déménage de New-York. Il détaille rapidement son grand-frère, notant de légères rides par endroits, mais globalement, il n’a pas changé. Bien que le cadet perçoive quelque chose comme de la douceur, une faille, il trouve que Will fait toujours aussi sérieux, mature, froid, hautain... Toujours la même attitude, toujours le même en fin de compte. La mâchoire de l’étudiant se crispe, la colère monte d’un coup. Comme un volcan qui entre en éruption.

Il ne fait même plus attention à Christopher, il a disparu pour lui. Son regard s’assombri, orageux, alors qu’il a une brusque envie de coller son poing dans la gueule de son grand-frère. Il réagit alors violement, en s’approchant avec la ferme intention de lui refaire le portrait. Mais l’ancien militaire agi tout aussi vite en le stoppant. Entre les deux frères. Malgré ses côtes, il tient son emprise sur les épaules du plus petit. Celui-ci relève ses yeux sur lui, toujours aussi en colère. Il a la rage, sérieusement. Il ne tient même pas compte de la douleur que doit contenir son amant, à le retenir ainsi. Tout ce qu’il souhaite c’est faire comprendre à William à quel point il lui en veut. Son amant arrive cependant à le raisonner, son calme aidant, même s’il pense que le brun ne mérite pas mieux. Chris le connait parfaitement pour savoir que Morgan pourrait regretter ses gestes. Et il n’a franchement pas tort.

Merlin hoche une fois la tête, encore avec cet air renfrogné, lorsque son amant lui dit de ne rien faire de stupide. Il essaiera. Puis l’américain s’adresse à tous les deux, en avançant qu’ils doivent se parler, et donc que lui-même sera dans sa chambre. Le plus petit anglais le suit un court instant du regard, avant de reposer son attention sur son grand-frère adoré. Un court instant. Car il se fait surprendre lorsque Christopher l’embrasse. Il acquiesce plus par réflexe qu’autre chose, rougissant contre son gré. Mais il essaie de passer outre ce petit détail, ce baiser juste devant les yeux de William qui n’est pas censé savoir ça. Il essaie aussi de ne pas se concentrer sur le fait que son frère n’a pas réagi. Sa colère première est de toute façon trop forte. Il repose son regard ténébreux sur William, et attend au moins que Chris ait monté les escaliers pour parler.

— Depuis 2008. Octobre il me semble, tu m’avais promis d’être là pour thanksgiving, dit-il d’un ton reflétant une colère froide et contenue. Tu as cinq ans de retard, William.

Il aurait eu de bonnes raisons de se tailler les veines, avec un père comme le sien et sans son frère à ses côtés. Heureusement qu’il est d’un optimisme sans bornes, qu’il y a eu sa mère pour être gentille et attentionnée, et ses amis pour tenir le coup. Morgan croise les bras, haïssant toujours son frère depuis la seconde où il a posé ses yeux sur lui, pour tout ce qu'il lui a fait endurer. Il serre les poings, se retient comme promis de lui en coller un sur le nez sur une impulsion.

William Smith, 28 ans.

William s’attendait bien sûr à recevoir un coup. Chris l’avait prévenu, que Morgan pourrait sans doute réagir fortement, avec tout ce qu’il a sur le cœur. Même si son frère n’est pas violent, ce cas ne figure ne l’étonnerait pas. Et comme prévu, l’étudiant réagit avec vivacité, avec très visiblement l’envie de le frapper. Will n’a pas bougé d’un pouce, s’apprêtant à se faire choper par le col et à avoir bientôt une douleur fulgurante sur le côté gauche du visage. Christopher s’interpose, de toute façon.

Depuis qu’il a posé un pied dans cette maison, Will a le regard fixé sur son petit-frère et note toutes les petites différences qu’il peut. La taille, Morgan est presque aussi grand que lui, sans doute cinq petits centimètres les séparent. Ses traits ont changés, ils font quelque peu plus âgés, mais il y a toujours cet air enfantin adorable. Et ses yeux, eux – outre l’orage de colère qu’on peut voir – n’ont pas changés. William se rend compte que son frère lui a vraiment, vraiment, vraiment manqué. Le voir grandir lui a manqué. Le voir tout court lui a manqué. Il s’en doutait, mais pas au point de ne plus avoir envie de repartir dans quelques heures. Cependant, il va devoir affronter le ressentiment du jeune anglais avant toute chose. Il ne se souvient pas de la dernière fois où Morgan a été à ce point en colère. Mais Chris arrive à le camer un peu, à lui passer l’envie de frapper avant de discuter.

L’américain précise quand même que Will le mériterait, et le principal concerné est aussi d’accord avec ça. Mais il s’en passera. Chris fini par dire que les deux britanniques ont besoin de discuter, seul à seul. Après un baiser déposé sur les lèvres de Morgan – mon dieu ce que c’est.. étrange... –, il les laisse tous les deux. Sans un mot échangé, William comprend très facilement la menace de Christopher, qui se soucie de son amant. Petit-ami plutôt, c’est encore le moins bizarre pour les qualifier. Il ne fait aucun commentaire sur leur relation, ce n’est pas le sujet de toute façon. Il subit sans sourciller le regard colérique que lui adresse son petit-frère. C’est lui qui prend la parole en premier, d’un ton qui ne lui ressemble pas. Mais qui traduit bien son état. Il évoque leur dernier contact téléphonique.

— Et bien je suis là maintenant, répond-il avec un calme olympien, alors qu’il défait son écharpe. J’ai appris que notre père t’as rendu visite en espérant te ramener à Seattle, parce qu’il a appris pour toi et Chris. Donc je suis venu pour.. disons, m’assurer que tout allait bien, explique-t-il en accrochant son manteau et son écharpe bleu au porte-manteau.

Il fait un peu comme chez lui, sous le regard toujours acéré de son petit frère. Bien qu’il reste calme, il reste aussi lui-même. Il devine que Morgan ne va pas apprécier. Et il n’apprécie pas du tout. Il n’hésite pas à élever la voix en lui disant qu’il aurait pu prendre des nouvelles plus tôt. William hausse silencieusement les épaules en passant à côté de lui pour rejoindre le salon. Son frère le suit en lui reprochant tout un tas de choses tout à fait vrai. En s’asseyant sur le canapé, William lui fait comprendre de faire de même et de se calmer, de parler de façon réfléchie, et de ne surtout pas s’emporter. Ensuite viennent les explications. L’aîné avoue ses torts, chose qui laisse le cadet sans voix étant donné que c’est la première fois qu’il reconnaît avoir accumulé les erreurs. Il explique qu’il ne pouvait de toute façon pas rester, qu’il serait parti seul, mais qu’il est vrai qu’il aurait pu garder contact avec lui.

Merlin trouve encore d’autres choses à dire, mais bientôt, c’est le silence qui s’installe. Will n’a pas tout avoué non plus. Après une ou deux minutes, passées avec une certaine tension, William sent que son frère va craquer. Il se rapproche de lui et le prend dans ses bras au moment où le premier sanglot est étouffé. Comment avant. Ou presque. Morgan se réfugie contre lui, murmurant encore une fois à quel point il lui en veut, entre deux larmes. Mais le plus âgé est presque soulagé de le voir pleurer, sans ça, ce ne serait pas son petit-frère sensible. Sans rien rétorquer à ce qu’il vient de lui dire, Will lui répète doucement qu’il s’en veut pour n’avoir donné aucune nouvelle, et qu’il l’aime toujours. Ils sont frères, même à des milliers de kilomètres ça ne changera pas.

Christopher n’hésite pas longtemps avant de se placer entre William et Morgan. Même si son meilleur ami de lycée mérite une grosse raclée plus que quiconque, Christopher ne veut pas une dispute de ce genre dans sa maison. Un passage à tabac il y a quatre jours est amplement suffisant, pas besoin qu’il y en ait un second en si peu de temps. Alors, faisant comprendre à Morgan de bien réfléchir avant d’agir et à William de ne pas toucher à un cheveu de son chéri, il se détourne finalement et monte dans sa chambre, laissant les deux frères parler entre eux. En entrant dans sa chambre, il se dirige vers le lit et, grimaçant, se tenant les côtes, il s’y installe. Le regard rivé sur la porte qu’il a prit soin de laisser ouverte.

Penché en avant, une main posée sur ses côtes, l’autre reposant sur son genou, Christopher ne fait aucun bruit, tentant d’écouter la conversation entre les deux frères. Mais s’il ne prend que les voix en compte, il ne comprend pas ce qu’elles disent. Il sait juste que Morgan est celui qui s’existe le plus, ne laissant pas le temps au plus âgé de dire quoique ce soit. Il entend ensuite des bruits de pas, un bruit sourd comme si quelqu’un s’assaillait sur quelque chose puis les voix reprennent pendant quelque temps. Christopher n’a aucun de mal à différencier la voix de William de celle de Morgan, l’une étant plus grave que l’autre. Ça le fait sourire un peu. Au moins son ami met vraiment sa fierté de côté et s’explique. Du moins est-ce que l’ancien officier espère. Et ce plus que tout au monde.

Puis le silence. C’est limite Christopher respire lui-même. Que se passe-t-il ? Se sont-ils tout dits ? Christopher lance un coup d’œil sur sa montre. Ça fait 15 minutes qu’ils parlent. Peuvent-ils réellement s’être tout dits en si peu de temps ? Et Comment William a-t-il vraiment réagit ? L’ancien militaire attend encore quelques minutes avant de ne plus pouvoir résister. Se penchant en avant, il se redresse puis se lève du lit et s’avance vers la porte de sa chambre. S’arrêtant là, il écoute encore une dernière fois avant de descendre lentement les escaliers, faisant attention à ne pas faire plus de bruit qu’il ne faut. Doucement et discrètement il s’avance vers le salon.

Là, il s’arrête à l’entrée et sourit. Il ne rien faire d’autre, attendrit par ce qu’il voit. Morgan dans les bras de William, son frère le serrant gentiment contre lui, avec cette sincérité dont seul un grand frère aimant peu faire preuve. Croisant les bras, d’appuyant contre le chambranle de la porte, Christopher se fait discret, laissant les deux frères profiter de la proximité de l’autre, avant de ne plus pouvoir résister.

« Vous êtes mignon tous les deux, vraiment. » sourit-il.

En les voyant se tourner vers lui, Christopher sourit. Mais son sourire disparait subitement en voyant Morgan. Ou plutôt le regard qu’il lui lance. Un regard dont la fatigue est plus fort que la lueur de reconnaissance qui y brille. Et c’est, maintenant qu’il l’observe vraiment attentivement, que l’ancien officier le remarque : de grosses cernes, un teint pâle, les joues creusé, le regard fatigué. Comme si Morgan était à bout de force. Le cœur serré, Christopher s’avance et s’accroupie devant lui.

« Tu devrais monter te coucher et te reposer » dit-il en tendrement en caressant gentiment le dos « ok ? Je te rejoins plus tard et on parlera demain. D’accord ? »

Toujours accroupie devant lui, Christopher le regarde avec une tendresse bien particulière. Son pauvre chéri à vécu bien trop de galères ces derniers temps qu’il n’ait le droit de supporter. Avec un sourire encourageant, il lui tapote légèrement le genou. « Allez va » lui souffle-t-il en plongeant son regard dans celui de son amant.

Heureusement que Chris s’est interposé, finalement. Morgan devrait le remercier plus tard. Mais pour le moment, il écoute ce que lui dit William. Visiblement, il est au courant pour sa relation avec Christopher, mais ça n’a pas l’air de le secouer plus que ça, puisqu’il n’évoque cela que pour expliquer la visite du père. C’est d’ailleurs pour cela que lui-même est venu. En voyant l’espèce de nonchalance de son frère, l’étudiant se sent un peu plus énervé. Il a l’impression qu’il prend ça à la légère. Le plus jeune ne tarde pas à lui remonter les bretelles, en lui disant que s’il avait voulu, il aurait pu prendre de ses nouvelles plus tôt. Qu’il aurait pu l’appeler, accepter de lui parler, qu’il aurait pu le revoir bien plus tôt s’il l’avait voulu. Il a quand même fallu que son père le menace pour que son frère rapplique.

William ne fait aucune remarque. Bizarrement. Mais Morgan ne s’attarde pas, et continu de lui rappeler de nombreuses choses. Tout ce qu’il a manqué en tant que grand-frère par exemple. Les fois où il aurait dû être là, où le cadet a eu besoin de lui. Il lui reproche par-dessus tout de ne pas avoir donné de nouvelles pendant plus de cinq ans, alors qu’il a gardé contact avec Chris. Il s’est assis, avec Will, et se calme à peine. Il lui fait remarquer quand même que s’il n’était pas tombé sur l’américain, il n’aurait jamais su ce qu’était devenu William. Et il ne sait pas non plus ce qu’il serait lui-même devenu. A ce moment-là aussi, un grand-frère aurait été très utile. Ledit grand-frère reconnait d’ailleurs ses torts. Sans discuter, sans marchander. Merlin reste un instant interdit. C’est la première fois dis donc. Ensuite, le bouclé lui explique qu’il ne pouvait pas faire autrement que partir.

Ils parlent pendant un moment, Morgan ne tient pas le compte. Il a l’impression d’avoir dit beaucoup de choses, mais en même temps tellement peu. Ils n’ont pas changé de sujet, et ils n’en ont pas fait le tour. Cependant, le plus jeune devine bien que Will ne lui dira pas tout en détail, c’est toujours comme ça. Mais il estime qu’il lui en a déjà assez dit. Le plus important sans aucun doute. Et puis un silence s’installe. Un silence encore tendu, mais Morgan se refuse de questionner de trop son frère. Il se rend soudain compte que cet imbécile est là, à côté de lui, tout proche, pour la première fois depuis trop longtemps. C’est étrange, mais un truc le retient, alors qu’il a envie de le serrer contre lui. Et au moment où un premier sanglot lui échappe, étouffé, il se retrouve contre le torse de William. Sans plus attendre, il passe ses bras dans son dos et se laisse aller, n’oubliant pas de lui dire à quel le point il le déteste encore pour ce qu’il a fait.

Will lui présente quelques excuses, et lui dit qu’il l’aime. Morgan serait à deux doigts de lui pardonner rien que pour ça. S’il savait à quel point ça fait du bien de l’entendre dire ça, le plus petit n’y croyait plus. Il le serre encore plus contre lui, comme pour s’assurer qu’il est bien réel, et constate bien évidemment que son étreinte lui est rendue. Il sursaute à peine lorsqu’il entend la voix de Christopher. Se détachant, les deux frères se tournent vers lui. Le plus jeune arque un sourcil lorsque son amant lui dit d’aller se coucher et se reposer. Il fronce les sourcils, s’apprêtant à rétorquer, mais en fin de compte, c’est vrai qu’il est fatigué. La venue de Will vient d’en rajouter une couche. Du dos de la main, il essuie ses larmes et renifle un coup, mais secoue la tête.

— Je n’ai pas envie. Il tourne les yeux sur son frère. Il en profiterait encore pour partir, siffle-t-il très sérieusement et très peu confiant, en fixant William. Puis il va se reblottir contre lui. Tu restes cette nuit, c’est non négociable, et je dors avec toi, dit-il en s’adressant à lui. Il tourne la tête pour porter son regard sur Chris. J’espère que ça ne te dérange pas.. ? demande-t-il d’une petite voix.

Il dormira avec Will dans la chambre d’amis. Il veut profiter de la présence de son frère un maximum car, sans même le lui demander, il sait qu’il repartira bien trop rapidement. C’est sa manière d’être. D’un autre côté, Morgan espère que ça ne gênera pas Chris, celui-ci comprendra.

Christopher est accroupi devant son amant et ne peut empêcher un sourire de prendre place sur ses lèvres. Les deux frères ont l’air de bien se porter. Et derrière la fatigue qui marque le visage du plus jeune, l’ancien officier sait qu’un fort soulagement y figure. Du moins, aimerait-il le croire. Une main posée sur le genou du plus petit, il lui dit d’aller se coucher pour trouver un peu de repos. Faut dire qu’il a vraiment sale mine là. Mais Christopher se garde bien de faire un commentaire de ce genre, encourageant simplement son amant de monter dans leur chambre. Mais, alors qu’il avait l’impression que le plus jeune allait lui obéir, résigné, il dit qu’il n’en a pas envie, lui faisant part de sa crainte de voir son grand frère repartir sans lui dire au revoir. Regardant ensuite vers William, il lui dit que s’il va dormir ce n’est qu’avec lui, avant de reporter un regard incertain sur Christopher et lui demander si ça ne le dérange pas.

« Pas de souci mon chéri » dit-il en secouant doucement la tête, souriant tendrement. « Mais tu veux bien me le prêter encore quelques instants ? J’aimerais bien lui parlé deux minutes. Je l’envoie ensuite dans la chambre d’amis, une fois fini. Ok ? »

Il reste encore quelques instants sur place, attendant une réponse de son amant. Mais cette réponse mettant du temps à arriver –peut-être hésite-t-il réellement ?- l’ancien officier décide de se relever. En plus de ses côtes, c’est maintenant aussi sa cheville qui commence à se réveiller. Se maudissant intérieurement, sachant pertinemment que la position accroupie est pareille à du poison pour son articulation, il cache pourtant cette sensation désagréable. Le regard toujours rivé sur Morgan, il désigne les escaliers.

« Je te promet que tu retrouveras ton frère dans moins de 20 minutes. » reprend-t-il en lui posant une main sur l’épaule « Mais seulement si tu montes te reposer maintenant. Deal ? »

William Smith, 28 ans.

Sentir enfin son petit-frère contre lui est un bonheur sans nom. Ca fait bien trop longtemps qu’ils ne se sont vus. Il a été plus que stupide d’entretenir cette distance. Surtout qu’il n’avait aucune raison valable depuis qu’il a appris que son frère était maintenant loin des parents, chez Chris. Il passe sa main sur les cheveux de Morgan, se rappelant qu’il adore ça. C’est d’ailleurs en lui caressant doucement les cheveux qu’il entend la voix de Chris leur dire qu’ils sont mignons. C’est tellement rare qu’on utilise cet adjectif pour lui que Will sourit en coin, mais il se retient de rétorquer quoique ce soit. Se retournant vers lui, il note de toute façon un changement net dans son expression.

Tournant les yeux vers son petit-frère lorsque Christopher dit à celui-ci d’aller se reposer, il fronce les sourcils. C’est vrai qu’il a l’air fatigué le petit. Il remarque aussi la tendresse chez l’ancien militaire, qu’il n’avait jamais vu aussi présente. C’est dingue. Il est plus qu’amoureux de son frère, il est complètement dingue de lui. C’est le genre de comportement, d’expression, que ses parents auraient entre eux. Et s’il y a bien une chose que William peut passer à ses parents, c’est qu’ils s’aiment profondément. Mais venant de ce gamin de Morgan, ce n’est même pas étonnant qu’il refuse. Il dit que s’il s’en va, le britannique partira. Puis il décide d’autorité qu’il restera ici cette nuit, et qu’ils dormiront ensemble. Will hausse légèrement les sourcils, puis s’autorise un sourire attendrit en le serrant un instant contre lui alors que Morgan est revenu se blottir dans ses bras. Il soupire à la réponse positive de Chris qui ne voit aucun inconvénient à ce que Morgan dorme avec lui ce soir.

— Mais vas-y, aide-le en plus, histoire que je ne puisse vraiment pas refuser.

Il croise le regard presque inquiet de Morgan, et le rassure avec un léger sourire. Mais Chris prend la parole immédiatement, disant qu’il aimerait bien discuter avec Will, et qu’ensuite il l’enverra dans la chambre d’ami. William décide de laisser son petit-frère répondre, mais celui-ci ne dit rien. L’observant, il devine qu’il hésite vraiment. En se relevant, l’américain réitère sa demande, en lui promettant qu’il retrouvera Will bientôt, seulement s’il va se reposer. L’aîné voit bien que Merlin ne fera rien sans être sûr qu’il restera bien. Il l’attire alors à lui dans une rapide étreinte, et le rassure.

— Je reste, promis, ne t’en fais pas. Mais je devrais repartir demain. Il lui ébouriffe les cheveux en le laissant se redresser. Maintenant écoute un peu la voix de la sagesse. Chris a raison, vas te reposer, tu en as clairement besoin. Et il n’y a pas de mais.

Il a repris sa voix de grand-frère, et fixe à présent Morgan.

Morgan est fatigué, c’est vrai, mais il n’a pas envie de quitter son frère dès maintenant. Il est heureux de l’avoir retrouvé, soulagé de lui avoir enfin parlé, mais ne veut pas le quitter. Il a d’ores-et-déjà décidé que Will resterait pour la nuit. Il a aussi décidé qu’il resterait avec lui coûte que coûte cette nuit. Comme avant. Ils leur arrivaient souvent de partager le même lit, quand Morgan cauchemardait. Même quand ils se revoyaient, après l’entrée à l’université de William. Le plus jeune avait besoin de cette présence, de ce contact, tellement ils se voyaient peu alors. Néanmoins, il s’enquiert de l’avis de Chris, et celui-ci n’y voit aucun inconvénient, comme il fallait s’y attendre. Will a alors une réflexion qui interpelle l’étudiant, mais lorsque celui-ci croise son regard, il croit comprendre qu’il dit ça sans le penser.

Son attention est ensuite réappropriée par Christopher, qui lui assure que Will le rejoindra plus tard, ils veulent juste discuter. Morgan réfléchit, ne voyant pas pourquoi il devrait partir au final. S’ils veulent discuter, ils peuvent très bien le faire non. Il est vrai aussi que lui finira par s’endormir, mais qu’il voudra absolument suivre la conversation, et donc qu’il fatiguera. Et puis, ne l’ayant pas entendu, il ne croit pas William. Il hésite, se mord un peu l’intérieur de la joue. Son regard reste posé sur Chris lorsque celui-ci se lève. Il lui promet qu’il retrouvera son frère, mais qu’il doit aller se reposer maintenant. Le petit brun reste silencieux, jusqu’à ce que William l’attire dans une étreinte. Il le rassure, en lui promettant à son tour qu’il reste cette nuit, bien qu’il doive repartir dès le lendemain. Ca il s’en serait douté. Il se laisse ébouriffé les cheveux, se redresse, et l’écoute lui dire qu’il faut faire ce que l’ancien militaire lui dit. Il a sa voix implacable, qui ne saurait souffrir d’aucun commentaire. Morgan le regarde un instant, puis pousse un court soupir.

— T’as pas changé, t’es toujours aussi énervant, grommelle-t-il, marquant par là son abandon.

Avant de se lever, il va déposer un baiser sur la joue de son frère, dans un réflexe qu’il croyait perdu. Faut croire que non. Il lui suffit de retrouver Will pour retrouver les habitudes qu’il avait avec lui. Il se relève alors et se trouve face à Chris. Il n’hésite pas vraiment longtemps avant de se hisser sur la pointe des pieds. Il l’embrasse rapidement sur les lèvres, avant de se détourner avec un léger sourire. Après tout, si Christopher se permet de faire ça, Morgan ne va pas se gêner. En montant les escaliers, il se demande tout de même ce que William peut bien penser de tout ça. Il lui demandera plus tard. Il va d’abord se changer comme s’il allait dormir pour la nuit. Au moins ce sera fait. Avec un bâillement, il va dans la chambre d’amis, en se disant que la dernière fois qu’il y a dormi, c’était pour fuir Chris. Maintenant, c’est pour être avec son frère. Une fois sous la couette, il entend leurs voix, bien qu’il ne perçoive pas les mots. Et ça l’aide à se détendre.

Sur ce coup, toute l’attention de Christopher est portée sur Morgan. Inquiet de le voir dans cet état de fatigue, il parle tendrement, faisant preuve de calme. Pour une fois, ce n’est pas lui qui se montre autoritaire, mais bel et bien William. Etant du même avis que l’ancien officier, l’anglais soutient ce dernier dans l’idée que Morgan a besoin de repos, se montrant tout de même plus intransigeant que l’américain. Christopher, sentant sa cheville se réveiller, se relève promptement pour contrer la douleur qui risque de se propager dans son pied, tout en observant les deux frères se faire un dernier câlin. Il sourit ensuite lorsque Morgan dépose un bisou sur la joue de son frérot, avant de se lever. Plongeant quelques instants son regard dans celui de son amant, l’ancien militaire sourit intérieurement lorsque leur lèvres se lient en un doux baiser. Par réflex, il pose une main sur la hanche de son chéri, l’attirant furtivement contre lui et répondant amoureusement au baiser.

« sage décision » souffle-t-il avant de faire un pas sur le côté et laisser son amant partir.

Il le suit encore longuement du regard et ce n’est que lorsqu’il monte les escaliers, disparaissant de son champ de vision, que Christopher se tourne vers William. Il croise son regard, l’observe quelques instants puis, se tenant les côtes, s’installe. Soupirant légèrement, il se recule contre le dossier et attend que la douleur s’atténue avant de tourner le visage vers son ami.

« ça va ? » demande-t-il afin de briser le silence. Il croise à nouveau le regard de William qui vient porter son attention sur lui et sourit doucement. « Je ne vais pas demander de quoi vous avez parler, ça reste entre vous. » précise-t-il « Mais je … » il se redresse légèrement, déviant le regard « J’espère que ça ne te dérange vraiment pas. » reprend-t-il après un temps de silence « Cette situation. Ma relation avec Morgan » il relève son regard sur William « Tu sais je l’aime vraiment ton frère. Et si déjà ton père n’accepte pas cette chose, j’espère au moins pouvoir compter sur ton soutien à toi… »

Certes, William ne lui a pas dit qu’il désapprouvait cette relation amoureuse, mais il ne lui a pas non plus dit explicitement que ça lui convenait. Alors même si Christopher sait d’ord et déjà qu’il ne se séparerait de Morgan pour rien au monde, même pas pour William ou pour ses propres parents, il aimerait simplement que son meilleur ami de lycée accepte son orientation sexuelle et surtout le fait qu’il aime son frère.

William Smith, 28 ans.

William est du côté de Christopher. Alors que ce dernier joue la carte de la tendresse, Will remarque bien que s’il ne fait rien, Morgan ne le quittera pas. Alors, après lui avoir promis qu’il restera ce soir, il reprend par instinct son ton de grand-frère en lui disant d’aller se reposer, qu’ils pourront parler plus tard autant qu’il le souhaite. Le cadet fini par capituler, grommelant quelque chose comme quoi William est toujours aussi énervant. Mais il dépose d’abord un baiser sur la joue de son frère – comme quoi les vieilles habitudes ne se perdent pas – avant de se lever. Avisant Chris, il l’embrasse furtivement, et l’américain répond à ce baiser, posant une main sur sa hanche. Le grand-frère les observe, non sans un léger sourire. C’est beau à voir.

Puis ils se séparent et Morgan se dirige vers les escaliers pour monter à l’étage. Will ne le quitte pas des yeux, jusqu’à ce qu’il disparaisse. Il n’en revient toujours pas à quel point son adorable petit-frère encore innocent et naïf a changé. Il l’est toujours un peu, certes. Mais pour lui, Merlin est et restera son petit-frère. Croisant le regard de Christopher, qui vient s’installer à côté de lui, William reste encore silencieux. Son ami l’assure qu’il ne demandera pas de quoi ils ont parlé, que ça regarde qu’eux. Le britannique hoche la tête, même si certaines choses, comme des explications, regardent aussi Chris. Ce dernier en vient au suite à sujet peut-être plus sensible de son point de vue. Il lui demande si la relation qu’il entretient avec Morgan le gêne. Le brun comprend son point de vue, le fait que leur père est déjà contre ça, et que l’ancien militaire aimerait qu’au moins lui accepte ça.

— Arrête de t’en faire, commence-t-il avec un léger sourire, puis il redevient sérieux. Je sais que tu l’aimes vraiment, ça se voit. Lui aussi il est t’aime. Il faudrait être aveugle pour ne rien voir. Il marque une courte pause. Je te l’ai déjà dit, ça ne me dérange pas qu’il soit avec toi, tu sauras prendre soin de lui. Peu importe que vous soyez deux hommes, vous êtes heureux ensemble, c’est le principal.

L’anglais n’a pas de mal à accepter ça. C’est un peu étrange et bizarre, incongru, mais il s’y fera. Le plus important pour lui, c’est bonheur de Morgan. Qu’il soit dans les bras d’un homme ou d’une femme, ça ne change rien. De toute façon, même s’il le voulait, il ne pourrait les séparer, il l’a bien compris. Et puis non, en y réfléchissant, ça lui convient vraiment. Au moins, il sait que son petit-frère n’a rien à craindre. Christopher est intègre, et il l’aime de tout son cœur. Ce n’est pas si courant de nos jours, les relations stables et sérieuses. Les gens de leur âge essaient souvent de se caser, mais ça ne dure parfois pas longtemps. Et ce n’est pas les jeunes de l’âge de Morgan qui sont dignes de confiance. Et puis William pose une question, de but en blanc.

— Ça fait combien de temps vous deux ?

Christopher ne sait pas ce que son ami anglais pense de l´homosexualité. Mais il sait qu´il aime son frère et qu´il ne souhaite que son bonheur. L´ancien officier sait aussi que le lien amical qui les uni est fort et n´a que très légèrement perdu en intensité depuis la dernière fois qu´ils se sont vu en live. Il sait aussi que William n´est pas méchant, bien au contraire, et ne serait aucunement contre le bonheur de Christopher. Et pourtant ce dernier n´est pas sûr de ça. Enfaite, il depuis la venue du père de son amant, il n´est plus sûr de rien. L´ancien officier était près à parler à sa propre mère de sa relation avec Morgan, mais maintenant qu´il sait que Mary Smith n´a pas, ou très mal, supporté le fait que son plus jeune fils soit de l´autre bord, il n´est pas sûr de savoir comment sa propre mère réagirait.

Alors il fait part de ses craintes à son ami. Et ce ouvertement. Il sait que William ne le jugera pas, mais il ne peut s´empêcher d´avoir des doutes. Doutes qui, pourtant, se volatisent très rapidement, dès lors que l´anglais lui répond. Avec un léger mais bien visible sourire, il lui dit de ne pas s´en faire, qu´il ne faut pas être aveugle pour savoir que Christopher aime Morgan et vice versa. Puis, aprés un court temps de silence, il reprend en lui répêtant ce qu´il a dit avant, au bord de Rogue River: il est persuadé que Christopher saura prendre soin de son frère, ce à quoi le concerné sourit doucement en hochant la tête.

Il s´occupe de Morgan, et s´occupera de lui jusqu´au bout. Il ne supporte pas de le voir triste. La dernière semaine avait donc été horrible. Pour les deux. William conlut ses paroles en disant que le principal, de toute manière, était que tous deux soient heureux. Sans perdre son sourire, Christopher répond.

"Merci." dit-il en baisant légèrement le regard "Je ne sais pas pourquoi mais je ... j´avais des doutes quant à ta réaction." il hausse les épaules et relève son regard sur son ami, son sourire s´agrandissant un peu "Je veux dire, on a jamais parlé de ce sujet, ou plutôt ne l´a-t-on jamais abordé sérieusement." il pince légèrement les lèvres "Quand on en parlé, c´était souvent en rigolant." il souffle par le nez "Qui aurait crut que ça allait arriver à l´un de nous, un jour hein?" reprend-t-il en souriant, amusé.

Il est vrai qu´ils ont bien souvent fait des blagues par rapport à ce sujet. Il se sont très souvent gentiment moqué est homosexuel trop efféminisé qu´ils croisaient dans la rue, sans pour autant qu´un d´eux ait quelque chose contre ces personnes. Au contraire. Dans leur groupe d´amis -ou plutôt dans celui de Christopher- il y avait bien un couple d´homosexuel et une lesbienne. Et c´était souvent avec eux qu´ils rigolaient le plus. Mais ce n´est pas la même chose, car ici c´est l´ancien officier, directement, qui est touché. Enfin. William souhaite ensuite savoir depuis combien de temps Morgan et Christopher forment un couple.

"Six mois" répond-t-il directement, sans réfléchir "Enfin, plus ou moins" se reprend-t-il avec un signe de la main "Je veux dire c´est ... assez difficile à définir tu sais?" il marque un temps d´arrêt, le temps de se rappeller des différentes situations "Il y a eu la crise de jalousie de Morgan à une fête parce que j´étais en compagnie d´une jeune femme -très sympathique au passage- puis une rumeur qui nous a mit en couple avant même qu´on soit au courant qu´on soit amoureux l´un de l´autre" il fronce légèrement les sourcils sans pour autant se départir de son sourir "Puis une balade à cheval qui s´est soldé par une chute de Morgan et qui a réveillé en moi des sentiments étranges et ... voilà, ça a évolué comme ça" il sourit et hausse doucement les épaules "Aproximativement 6 mois je dirais." il dévie le regard, se taisant un instant avant d´arquer un sourcils "Ce que le temps passe vite quand même ..."

William Smith, 28 ans.

William n’a vraiment rien contre l’homosexualité. Chacun fait bien ce qu’il veut. Que ce soit son petit-frère ou son meilleur ami, ça ne change rien. Bien qu’il soit clairement surpris pour le second. Qui serait-il pour juger ? Ce qu’il souhaite c’est le bonheur de ces deux-là, il n’a aucune raison d’être contre leur relation. Pourtant, Christopher n’est pas sûr de cela. L’anglais a bien vite fait de le rassurer. Mais chacun a ses propres réactions face à une telle nouvelle, on ne peut jamais vraiment savoir. La plupart des gens disent qu’ils n’ont rien contre ça, et dès qu’ils sont concernés par un proche, ils peuvent bien ou mal réagir. Mention supplémentaire pour les parents et la famille proche. Lui-même ne peut pas être cent pour cent sûr de la façon dons sa mère a réagi en apprenant pour Morgan.

L’ancien militaire, après l’avoir remercié de sa compréhension, lui avoue donc avoir eu des doutes. Ils n’en ont jamais parlé sérieusement, c’est vrai. Comme tous jeunes ils blaguaient à ce sujet. Ou plutôt, Chris et ses potes se sont déjà gentiment moqués des gays trop efféminés. De plus, ils connaissaient bien un couple d’homo et une lesbienne. Chris et Will n’ont jamais rien eu contre eux. L’anglais n’en a de surcroît rien à foutre puisque cela sort de toute raison. Pourquoi aime-t-on un homme et pas une femme ? Pourquoi l’inverse ? Tout à fait stérile comme questionnement. En revanche oui, qui aurait cru que ça arriverait à l’un d’eux.

— J’avais des doutes pour Morgan, mais c’est vrai que j’aurais pu ne pas le croire pour toi si tu ne me l’avais pas dit en face.

Il avait pu s’assurer que Chris ne se foutait pas de lui, même si un truc comme ça est sans doute trop gros pour être un mensonge délibéré. Will demande ensuite depuis combien de temps son ami et son frère sont ensembles, et cela apporte une réponse bien plus longue qu’il ne l’aurait cru. Comme il s’y attendait tout de même, ce fût compliqué. Il apprend donc que cela fait plus ou moins 6 mois, mais qu’il y a eu plusieurs situations avant d’en arriver là. Une crise de jalousie de son frère, une rumeur sur eux avant même qu’ils soient au courant de leurs propres sentiments, puis une balade à cheval et une chute de Morgan. Chris a sûrement compris comme cela qu’il tenait vraiment à lui. William se souvient qu’il y a en effet quelques mois, en demandant des nouvelles de son cadet à Christopher, il avait appris pour la chute. Il s’était cassé la clavicule même. Néanmoins, Will n’avait pas eu vent de l’envers du décor. Pas plus de la jalousie de Morgan. Il le savait un peu possessif sur les bords, mais de là à être jaloux et à en faire une crise, peut-être pas. Mais si on part du principe qu’il un trop peu sûr de lui, alors ça devient logique. William hoche simplement la tête.

— D’accord, je vois. Difficile à définir en effet. 6 mois c’est pas mal quand même. Aaah.. je parie que mon petit Merlin tout innocent et naïf n’est plus... Il a bien grandi... soupire-t-il avec un léger sourire. Ensuite, Chris remarque à quel point le temps passe vite. Bientôt noël, bientôt le nouvel an, bientôt l’anniversaire de Morgan... 23 ans, moi 29 et toi 30. Il tourne son regard vers son ami. Coup de vieux non ?

Lorsque William lui fait part du fait qu´il ne serait jamais douté de l´homosexualité de Christopher, celui-ci se contente d´hausser les épaules. S´il est vrai qu´il a eu quelques copines, il est d´autant plus vrai qu´il n´a jamais rien vécu de tel avec l´une d´entre elles. Ses quelques relations n´étaient, au final, que superficielles. Rien de plus. Et rien que l´on pourrait comparer avec son actuelle avec Morgan. alors même si William dit vrai, Christopher ne sait pas vraiment quoi répondre à sa déclaration. Et avant de dire une quelconque connerie, il préfère se taire, répondant à la question suivante de son ami: la durée, combien de temps Morgan et lui sont déjà en couple.

Et c´est en partant dans les explications qui touchent directement ou indirectement son couple, que Christopher se rend compte que le temps passe extrêment vite. Il a l´impression que la fois oú Morgan est apparu sur le pas de sa porte n´a pas eu lieu en Avril dernier mais bel et bien hier ou avant-hier. Et pourtant, il y a eu tellement de choses qui se sont passé entre temps, et encore plus de choses qui ont changées depuis la venue de son amant. Lorsque William fait remarquer être certain que son petit Merlin n´est plus aussi naif et innocent qu´avant, Christopher sourit en déviant le regard. Effectivement, les nuits qu´ils passent ensembles sont tous sauf chatoliquement correcte. Mais William n´a pas besoin de le savoir ça, quoiqu´il s´en doute surement. Toujours-est-il qu´il continue encore quelques instant à parler de Morgan, avant d´évoquer son anniversaire. Christopher relève vivement son regard et interroge l´anglais du regard avant de se rappeller.

"C´est vrai qu´il a anniversaire le 1er Janvier" il secoue la tête et se passe une main sur le front "J´avais complètement zappé, merci de l´avoir dit" il sourit, amusé par sa propre bêtise, avant de reprendre son sérieux coller son poing contre l´épaule de son ami "T´arrête un peu oui? 30 ans ce n´est pas vieux hein!"

William répond un truc puis ils reprennent une discussion normale, parlant de tout et de rien, et oubliant le temps. Ce n´est que lorsque la montre de Christopher indique 20h, qu´il se redresse subitement. ça fait 2h qu´ils parlent et pourtant tout deux avaient promis à Morgan que William irait le rejoindre dans 20 minutes. L´ancien officier lance un regard incertain à son ami puis désigne l´escalier.

"Monte vite rejoindre ton fréro. Sinon il va m´en vouloir ... si ce n´est pas déjà le cas."

Il sourit et se lève en même temps de William. Après une dernière accolade -Christopher s´étonnant du fait que ce soit William qui ait, pour une fois, décider de le prendre dans ses bras- ils se séparent. L´anglais monte rejoindre son frère dans la chambre d´ami. Et Christopher? Il va se shooter aux anti-douleurs. Voilà.