Des fois ça le prend, comme ça, de parler pour ne rien dire. Pour se justifier quelques fois. Pour ne pas laisser un vide s'intaller. Toute fois, Morgan reste poli, et arrête un instant de penser aux pâtisseries qu'il va pouvoir faire pour saluer la caissière avant de sortir de l'épicerie à la suite de Chris. Chacun à un sac dans les bras, mais le plus pressé semble bien être l'américain. Celui-ci ralenti finalement un peu la cadence, ce qui permet au plus jeune de revenir facilement à sa hauteur. C'est qu'il marche moins vite, il a moins d'entraînement.

Cette fois-ci, c'est au tour de Christopher de monopiliser la parole. Il explique alors le programme ; rangement des courses, lui va faire son jogging pendant que Morgan doit débarrasser le salon du moindre poil de chat, puis ce sera l'aîné qui préparera le dîner. Bizarrement, Merlin a bloqué sur ce qu'il devait faire. Une grimace légère prend possession de son visage tandis qu'il soupire. Le ton strict et autoritaire de Chris. Il l'avait oublié celui-là. C'est le genre de chose qui le rebute et, s'il n'avait pas été responsable du désordre, il se serait sans doute rebiffé. Et puis, l'ancien officier pourrait sans doute subir une nouvelle crise d'allergie à cause de cela, et le britannique n'a pas envie que ça recommence.

— Ce n'est pas comme si j'avais le choix de toute façon, n'est-ce pas ? lance-t-il, désabusé et railleur, avant de hocher un peu la tête. Mais ce sera propre quand tu rentreras, ne t'en fais pas.

Quand il pense que sa grand-mère avait deux ou trois domestiques avant, il se dit que ce devait être la belle vie. Ne pas avoir à ranger, à faire le ménage, les lessives... Seul faire la cuisine ne le derange pas, en fin de compte. Mais depuis qu'il habite avec Christopher, il se fait sans cesse reprendre sur le moindre petit objet qu'il laisse traîner. D'accord, un bordel sans nom n'est pas souhaitable, mais tout de même. Ça n'est pas un verre resté sur la table du salon qui va tuer quelqu'un. L'américain ne doit pas imaginer les efforts que doit faire Morgan pour que sa chambre soit rangée vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Pour ne pas souler Christopher une fois de plus, le brun se retient de parler. Pas qu'il en ai spécialement envie, mais une conversation ne ferait pas de mal. Cependant, l'absence de paroles n'est pas aussi pesante que ça. Ce qui facilite le silence du plus jeune. Il sait aussi que Chris aime bien la solitude, trait de caractère qu'ils ne partagent pas vraiment. Morgan la supporte, c'est différent, même s'il préfère être seul que mal accompagné. Aussi, il se tait pour ne pas étouffer Chris, lui donner une impression de solitude, alors qu'il est quand même là. Et à vrai dire, cela suffit à Merlin d'avoir une présence. Chacun y trouve son compte. Le chemin du retour se passe donc en paix. Le britannique a d'ailleurs trouver une occupation ; il repère bien la route qu'ils prennent, pour la mémoriser correctement. Lorsqu'ils arrivent à la maison, ils rangent directement les achats, puis Morgan se plante à l'entrée du salon, et prend une respiration pour se donner du courage.

— Bon, au boulot, lâche-t-il avant d'aller chercher ce qu'il lui faut pour nettoyer, et au passage, il sourit à Chris, déjà sur le pas de la porte, prêt à sortir. Amuse-toi bien.

Ironie quand tu nous tiens. Et... pourquoi Morgan a la désagréable impression d'avoir soudain le rôle de la jeune femme au foyer ?