Heureusement, Morgan ne fait le difficile et ne résiste même pas lorsque Christopher lui dit d’aller l’attendre dans la voiture. L’observant plonger sa main dans la poche de son pantalon, il sourit doucement, se disant la proximité de ce jeunot est quelque chose d’extrêmement agréable. Relevant la tête et croisant le regard de Morgan, il lui sourit puis attend qu’il se soit dirigé vers la voiture pour faire claquer sa langue et guider les chevaux à l’intérieur de l’écurie.

Là, il s’occupe rapidement des deux équidés. Les dessellant en quatrième vitesse, il les met dans leur box respectif, leur cure rapidement les sabots puis va ranger le matériel et la bombe de Morgan. Au moment de revenir, dans le but de les brosser, il voit un des palefreniers entrer dans le box d’Avalon. Après avoir rapidement discuté avec lui et lui avoir expliqué la situation, l’homme hoche la tête, compréhensif, et promet de s’occuper des deux équidés. Christopher précise encore rapidement pour la rêne du cheval et promet de payer les frais de l’achat d’une nouvelle paire, puis se dirige rapidement vers sa voiture.

En ouvrant la porte, il est accueillit par une douce chaleur. Frissonnant, il s’installe au volant et referme la porte. Au moment de mettre le contact, il tourne sa tête vers Morgan et croise son regard. Souriant tristement à l’évocation de la balade, il hoche doucement la tête.

« Je m’attendais à autre chose … » dit-il en allumant le moteur.

Enclenchant la première vitesse, il démarre et s’engage sur le chemin pour partir du haras. Essayant du mieux qu’il peut d’éviter les nids de poules, il ne peut pas empêcher la voiture de les secouer de droite à gauche. Heureusement, le chemin pierreux laisse rapidement place au macadam régulier de la chaussée. Silencieux, Christopher roule un peu plus vite que la vitesse autorisé, puis prend à droite dans Rogue River Dr. et s’arrête devant sa maison.

« J’reviens vite » dit-il en sortant.

Sans laisser le temps à Morgan de répondre quoi que ce soit, il se dirige vers la porte d’entrée, l’ouvre et entre. S’appuyant contre la porte, Christopher pousse un lourd soupire et se passe la main dans les cheveux. C’est horrible. Pourquoi est-ce que ça devait toucher Morgan ? L’ancien militaire aurait donné cher pour être à la place du jeune homme. Le voir souffrir était tellement pire que de souffrir soi-même.

Tout en priant qu’ils ne découvriront pas quelque chose de grave à l’hôpital et que Morgan ne s’était rien cassé, il monte rapidement les escaliers et se dirige vers sa chambre. Là il délaisse ses habits trempé enfile un caleçon, un jeans et un t–shirt sec qui trainaient par là. Puis, il attrape un sac et entre dans la chambre de Morgan. Au hasard, il attrape des habits secs, les fourres vivement dans le sac à dos puis descends à nouveau les escaliers. Ignorant sa cheville qui se met à se plaindre du mauvais traitement, il chausse ses chaussures et ressort de la maison. Après avoir refermé la porte à clef, il retourne vers la voiture, envoie le sac dans le coffre et s’installe à nouveau à sa place.

« En route pour l’enfer » dit-il en remettant le contact.

S’engageant sur la chaussé, il roule silencieusement vers l’autoroute. Pendant 5 minutes, aucun d’eux ne parle. Mais c’est finalement Christopher qui décide de rompre ce silence qui devient un peu trop pesant.

« On aurait jamais du la faire cette balade » souffle-t-il doucement « Je n’aurais jamais du vouloir te convaincre que tout ira bien. Putain … » il lâche une main tremblante du volant et se la passe sur le visage puis dans les cheveux « Je n’aurais pas du insister … quel égoïste … »

Même sa voix tremble. Si Morgan s’était blessé plus gravement qu’il ne le pensait, Christopher ne se le pardonnera jamais.

Morgan est un peu surpris lorsqu'ils s'arrêtent, mais il n'a pas le temps de demander pourquoi que Christopher est déjà dehors. Intrigué, il le regarde s'engouffrer dans la maison, se demandant ce qu'il a derrière la tête. Mais il n'est pas non plus mécontent de cet arrêt. Les barbaries du chemins de tout à l'heure n'ont pas été sans conséquences, et maintenant il peut essayer de se détendre un peu plus. D'autant que tout ce qui retarde la visite à l'hosto est le bienvenu. Même si l'américain avait eu tendance à dépassé la limitation autorisée, et malgré la douleur, le brun n'était pas du tout pressé.

Finalement, Christopher ressort avec un sac à dos qu'il balance dans le coffre avant de reprendre sa place de conducteur. Puis il reprend la route sans perdre plus de temps. Aucun des deux amis ne dit un mot pendant plusieurs minutes. Merlin lui, pense juste à l'hôpital et où il se situe. Il sait bien qu'il y en a au moins un à Ashland, puisque c'est une grande ville. Mais il doit y en avoir un plus proche, à Medford par exemple, ou à Eagle Point, quoique cette dernière soit plutôt une petite ville. Bref.

Il revient à la réalité lorsqu'il entend les paroles de Chris. D'abord interloqué, Morgan comprend ensuite où il veut en venir. Cependant, il a tort. Complètement tort. Il n'y est pour rien. Certes il a insisté pour faire cette balade, mais seulement parce que le jeune homme avait refusé à cause de sa cheville blessée. Autrement, l'étudiant était tout aussi impatient de faire cette sortie. Imaginons qu'il n'y ai pas eu cette histoire de cheville, Merlin n'aurait pas eu à dire non, Christopher n'aurait pas eu à le rassurer, et tout ce serait quand même passé ainsi. Conclusion, ce n'est la faute de personne.

— Ne dis pas ça, tu n'es pas égoïste, dit-il d'une voix douce. Écoute Chris, tu n'as pas à t'en vouloir pour ma chute, tu ne pouvais pas prévoir ce qui allait arriver, personne ne le pouvait.

Son ton est toujours calme, apaisant. L'ancien militaire n'a pas à se sentir coupable pour une raison ou pour une autre, cet orage était imprévu. De plus, Morgan lui, ne lui en veut pas le moins du monde. Il voulait faire cette balade tout autant que lui. Et avec du recul, il se dit que ce n'est pas plus mal que ce soit lui le blessé dans l'histoire. L'américain a déjà sa cheville qui le malmène, c'est suffisant. Tirant un peu sur sa ceinture de sécurité, le britannique se penche un peu et vient poser sa main droite sur la cuisse de Christopher. Il lui offre un sourire rassurant, passant outre la douleur de son épaule.

— C'est bon, ça va, ce n'est pas le principal de savoir si oui ou non on aurait du faire cette balade, ou n'importe quoi du genre, ok ? affirme-t-il sans se départir de son sourire, puis il lui tapote un peu la cuisse avant de retirer sa main et de se réinstaller dans son siège. Et je t'interdis de te mettre dans des états pareils, c'est toi qui devras me rassurer à l'hôpital, ces trucs-là me terrorisent.

Et la route qui défile encore. Et ces fringues encore humides. Que c'est désagréable

Merlin est bien adorable de tenter de rassurer l’ancien militaire. Mais tout cela est vain. Christopher n’est pas du genre à perdre son sang-froid et il c’est déjà, plus d’une fois, retrouver dans la position de celui qui rassure le blessé. Mais là, c’était autre chose. Morgan n’était pas n’importe qui. C’était un gamin, un sale gosse, un enfoiré. Mais avant tout, c’était le frère de son meilleur ami et son ami. Et même plus que ça. Même si Morgan a 22 ans, Christopher détient une grande part de responsabilité par rapport à lui.
 
Dans cette situation actuelle, ce devrait être lui qui rassure Morgan. Il devrait être celui qui lui dit que tout ira bien et que ce n’est pas grave. Mais qui est-il pour prétendre ce genre de chose ? Il n’est pas médecin, il n’a pas les connaissances nécessaires pour dire si ou non la blessure de Morgan est grave. Ici, c’est bien le jeune anglais qui tente de rassuré l’américain. Tout d’abord en lui assurant qu’il n’était pas égoïste, puis en lui disant que personne n’aurait pût prévoir cette chute. Il se penche ensuite un peu sur le côté et pose sa main sur la cuisse de l’ancien militaire. Celui-ci tourne furtivement son regard vers Morgan et voit son sourire rassurant. Il reprend que c’est lui qui doit le rassurer par rapport à l’hôpital.
 
Christopher soupire, déglutit et se retourne vers la chaussé. Sa main gauche restant à son front, coude posé sur le rebord de la vitre, il pince les lèvres. Morgan avait raison. C’était à lui de le rassurer. Mais c’était tellement plus facile à dire qu’à faire.
 
 « Te dire que tout ira bien et que ce n’est pas grave, serait mentir ... » murmure-t-il en abaissant légèrement sa main  « Je … je ne sais même pas si c’est grave ce que t’as. Je … putain. » il se passe les doigts sur sa paupière gauche  « Imagine tu t’es cassé quelque chose ! Mais je ne me pardonnerais jamais ! »
 
Christopher sait qu’il dit des conneries. Mais c’est plus fort que lui. Il sait qu’aucun d’eux ne détient une part de responsabilité dans ce qui est arrivé. Et de toute manière ils ne pourront rien changer. Alors pourquoi continuer à se morfondre ?  Tout simplement parce que, encore une fois, il s’agit de Morgan et pas de n’importe quel autre collègue.
 
 « J’ai pas envie que tu vives ce que j’ai vécu … » reprend-t-il en un souffle, dans lequel on peut sans mal entendre de la panique.
 
Une panique qui, bien que contenu depuis qu’il a vu Morgan a terre, n’a que fait de grandir et qui menace de s’échapper d’un moment à l’autre.

La situation est étrange. Ce devrait être Morgan qui perd son sang froid, qui appréhende, qui panique au sujet de la gravité de sa blessure. Et ce devrait être Chris qui le rassure, avec cette formule qu'ont les adultes : "ça va aller". Certes, Merlin a peur de s'être cassé quelque chose, mais ce n'est pas cette peur qui va changer quoique ce soit à son épaule, alors il n'y a pas de raison de se faire du mauvais sang. Au pire, ça ne ferait qu'aggraver son cas. Bref, là, il a l'impression que c'est Christopher perd les pédales.

Le britannique affiche un air peiné lorsqu'il l'entend parler. Puis il se retrouve touché par tant d'inquiétude pour sa pauvre petite personne. Son coeur se gonfle de le savoir réellement inquiet pour lui. Il compte pour quelqu'un. Et beaucoup visiblement. Mais la cause du problème a l'air de se situer précisément ici. C'est parce que ça l'affecte lui que l'américain angoisse plus que de raison. Il se sent responsable de lui, encore. Ce qui lasse le brun au pus au point, sans pour autant qu'il le laisse paraître. La dernière phrase prononcée par l'ancien militaire atteint sa cible, mais plus par son ton que par ses mots. Morgan soupire légèrement, avant toute chose, puis il indique une petite aire de stationnement dont ils approchent, sur le côté de la chaussée.

— Arrête-toi là, lâche-t-il, et il coupe ensuite les protestations de l'ancien militaire d'un ton sec, et ferme. Christopher. Arrête-toi, là. Maintenant. Faut que tu te calmes, ou on va finir par avoir un accident, déjà que t'es en infraction depuis 30 km/h.

Il n'a pas fait dans la demie-mesure, il ne lui a laissé aucun choix. Il est rare que Merlin use de ce ton, or il est on ne peut plus sérieux, et ça s'entend. Fait est que la panique de Chris avait été palpable et qu'elle lui rappelait l'état dans lequel il était lorsque le jeune homme est revenu à lui après sa chute. Les nerfs pourraient lâchés, qui sait. Il n'était déjà pas concentré sur sa conduite et pour sa part, Morgan préfère arriver à l'hôpital entier plutôt qu'en morceaux. Nul besoin non plus de passer par la case "état critique" ou "cercueil". Une fois la voiture garée et le contact coupé, le brun se tourne vers Christopher.

— Je te le rappelle encore une fois, je ne suis pas sous ta responsabilité. Ma chute n'est pas de ta faute, j'ai voulu cette balade autant que toi, déclare-t-il posément, pour commencer. Maintenant c'est fait, ça devait se passer comme ça, ou je sais pas, mais- Non ne pense même pas à m'interrompre. Bref, arrête d'imaginer les pires scénarios, on n'a pas le temps pour ça, sinon on ne vit plus.

Il marque une pause, observant Chris. La panique est une chose contagieuse. L'inquiétude marque doucement mais sûrement les traits du jeune homme, son coeur s'accélère, sa respiration lui échappe. Non, ce n'est pas le moment d'une crise d'angoisse. Se calmant comme il peut, il essaye d'arrêter de penser au pire. Mais son caractère fait qu'en des moments pareils, il a besoin d'être rassuré. Et si Chris se sentait vraiment responsable, ou quelque chose du genre, il prendrait sur lui, au moins un peu. Ce n'est pas lui qui souffre physiquement après tout.

— Et.. je te demande pas de me mentir, ou de me dire que c'est pas grave, juste... commence-t-il, mal assuré, avant de se replacer contre le dossier, fixant ses mains comme si ça pouvait l'aider à trouver ses mots. Juste, dis-moi que tout ira bien parce que tu seras là, que.. que tu resteras avec moi, ou je sais pas. Mais là j'ai l'impression que-... Bon sang mais si tu craques j'ai quoi pour me soutenir moi ? lâche-t-il sans détour, pour finir, une main sur le front.

C'est déjà un miracle qu'avec la douleur qu'il a parfois ressenti, il n'ait pas encore versé de larmes, mais il sent que ça pourrait ne pas tarder. Christopher est censé être stable, rassurant et assuré. Et il se dit responsable de lui. Alors il n'a tout simplement pas le droit de perdre son sang-froid à la place de Merlin.

Christopher sent la panique monter en lui. Sa conscience et son cerveau lui hurlent de ne pas se laisser aller à cette panique, son coeur s´énerve. Se mettant a battre de plus en plus vite, accélérant sa respiration, il ne fait rien pour permettre à l´ancien militaire de se calmer. Celui-ci ne remarque qu´il a les doigts tellement crispés sur le volant qu´on en voit le blanc de ses phalanges et qu´il est entrain de dépasser sérieusement les limitations de vitesse, que lorsque Morgan lui dit de s´arrêter. Mais Christopher ne veut rien savoir. Il n´a qu´une seule envie: ramener le jeune anglais le plus vite possible à l´hôpital afin de le soulager de sa douleur.

Mais Morgan ne l´entend pas de la même manière. C´est sur un ton sec et ferme, qu´il lui ordonne de s´arrêter, tout de suite. Plus étonné par le ton que par les mots du jeune homme, Christopher se tourne furtivement vers lui, puis ralentit, active le clignotant et se place sur le côté. Arrêtant la voiture, il coupe le moteur et relache lentement le volant. Les muscles crispés de ses mains se délient lentement et douloureusement avant. Chrsitopher profite du silence se repartissant dans l´habitacle, pour se calmer peu à peu.

C´est Morgan qui brise le silence. L´observant d´abord du coin de l´oeil, l´ancien premier maître s´apprête à le couperlorsqu´il commence à parler de destin, mais l´anglais n´est pas d´accord avec lui et continu de parler. Et tandis qu´il parle, Christopher remarque que c´est au tour du jeunot de perdre pied. La panique étant contagieuse, l´inquiétude marque peu à peu ses traits et il fini avec les yeux fermé, une main posée sur son front, après avoir soufflé que si Christopher paniquait, lui n´avait plus personne à qui sá ccroher.

Lá méricain ferme les yeux et se mord sur la lèvre inférieure. Il a raison. Morgan a tellement raison que l´ancien officier est prit de remord et de mauvaise conscience. Qu´est-ce qui lui prend ? Il sait pourtant combien c´est important pour le blessé de se sentir soutenu par une personne de confiance. Il est, lui aussi, déjà passé par ce stade. Et ce plus d´une seule fois. Il doit donc prendre sur lui. Il doit refouler sa panique et la laisser éclater une autre fois. Pas maintenant.

"Désolé Morgan ..." souffle-t-il avant de prendre une grande inspiration. Rouvrant les yeux, il s´avance sur son siège et se tourne vers le jeune anglais. Levant sa main, il va lui caresser la joue, puis la nuque puis les cheveux et se penche finalement vers lui "Je reste auprès de toi, tu n´auras pas à t´en faire pour cela. Je ..." il soupire doucement, déglutit et attend que les mots reviennent."je t´aime"

Il ferme à nouveau les yeux et pose son front contre la tête du plus jeune. Voilà, c´était dit. Et maintenant que ces mots avaient franchit ses lèvres, Christopher voyait plus claire sur leur situation. Ce qu´il ressentait, ce n´est pas un sentiment quelconque. C´était l´amour. Ni plus, ni moins.

Rouvrant les yeux, il dépose un baiser sur la tempe du plus jeune puis abaisse sa main et se penche à nouveau vers le volant. Il remet le contact et redémarre. Roulant plus tranquillement, il prend à droite et s´engage sur l´autoroute en directe d´Eagle point.